De nos rêves naissent et meurent des mondes fantastiques.
   La vie, l'amour, la mort se côtoient dans un semblant de réalité,
   Dont seule notre imagination en fixe les limites.
   Vivre pour rêver, rêver pour vivre.....

 

Que la nuit te soit belle

 

Chapitre 1

 

Bonsoir, ami lecteur !

Bienvenue dans mon monde, le monde de la nuit.

Je suis la dernière d’une longue lignée, existant depuis l’aube de l’humanité, une lignée qui s’est développée dans l’ombre, se dissimulant pour survivre.

Certains d’entre-vous ont souvent soupçonné notre existence, mais nous nous sommes arrangés pour faire croire à un mythe, et souvent par delà le mythe se cache une réalité des plus sordides.

Mes congénères au fil des millénaires se sont détruits à force de combats, de complots....mais c’est une autre histoire ......

Affamée et épuisée, j’errais dans une sombre ruelle. Pour mon malheur, au moins une fois par semaine, je dois me nourrir, je le fais le plus discrètement possible, en faisant le moins de mal que je peux : je laisse toujours ma proie vivante en lui enlevant simplement le souvenir de ce qui s’est passé.

Les échos d’un chant parvinrent à mes oreilles, me faisant oublier pour un temps ma faim. Je me dirigeais donc vers la source de cette musique qui me fascinait, il était rare que je sois fascinée par quoi que ce soit. Depuis le temps que je vivais, j’en avais vu et entendu, plus rien ne m’étonnait.

Mais cette musique, ce chant parlaient à mon âme, enfin quand je dis mon âme, c’est une façon de parler.

Je m’adossai donc au mur du bâtiment, fermant les yeux et me laissant envahir par la musique, me surprenant même à chantonner. Je me rendis soudain compte que la musique avait cessé et je m’apprêtai à partir quand soudain, une porte s’ouvrit sur un jeune homme vociférant, qui semblait très fâché au vu des imprécations qu’il hurlait dans une langue à laquelle je ne compris rien ou presque. J’en vins à regretter de n’avoir pas plus étudié les langues depuis le temps, mais j’avais d’autres centres d’intérêt.

La porte claqua, le jeune homme se retourna si vite, que je n’eus pas le temps de me dissimuler et pourtant je suis rapide.

Nous nous retrouvâmes face à face. Cela faisait bien longtemps qu’aucun d’eux n’avait eu le loisir de m’observer.

Il était grand, noiraud, avec de drôles de mèches blondes, une coiffure en pétard, je ne vois pas comment la décrire autrement, maquillé, manucuré….Je n’aurais pas entendu sa voix, masculine au demeurant, je l’aurais pris pour une fille, mignonne en tout cas.

De son côté il vit de moi une jeune femme de taille moyenne, tout de noir vêtue, à la peau aussi pâle que la lune, aux yeux verts comme des émeraudes, aux longs cheveux roux cascadant jusqu’à la taille.

Nous nous observâmes aussi fascinés l’un que l’autre. Il finit par faire un pas dans ma direction. Je ne voulais pas lui faire de mal, aussi je choisis de disparaître .......

 

Chapitre 2

 

Quelle étrange femme, pensa Bill, encore sous le charme de cette brève rencontre !

Il retourna dans le bâtiment manquant de peu d’assommer, dans son élan, son frère jumeau Tom.

   - Tu ne peux pas regarder ou tu vas ? lui dit ce dernier.

   - Je suis désolé !

   - Tu t’es enfin calmé ?

   - Oui, ma foi j’ai mon caractère !

   - Ça, on le sait, lui firent trois voix rigolardes.

Georg et Gustav se joignirent à Tom pour chicaner un Bill, qui l’avait quand même bien cherché, car il est susceptible, Bill.

 

Comme il chante dans le groupe formé par les quatre compères, que de plus il a une voix d’ange et qu’il a le don d’attirer l’admiration de la foule, il en profite un peu pour se faire mousser et les autres ne se gênent pas pour lui lancer des vannes.

Il est tard, le concert a été épuisant. Après un bref repas, que l’un des gardes est allé chercher au Mac Do du coin, ils rejoignent leur bus aménagé pour y dormir, durant le trajet nocturne pour la prochaine ville, où aura lieu leur concert du lendemain.

Chacun prend une douche rapide et rejoint une confortable couchette. Tom, quittant son éternelle casquette, attache ses longues dreads qui lui glissent sur le visage. Georg s’attache consciencieusement les cheveux dans l’espoir qu’au lendemain ils seront bien lissés, au lieu de frisotter affreusement, mais…faut pas rêver…..

Gustav, lui, est à cent lieues de ce genre de soucis, avantage des cheveux courts ! Sa préoccupation est plutôt de ne pas laisser tomber une de ses baguettes en plein concert ! Sa hantise : devoir jouer de la batterie avec une seule baguette.

Quelques heures plus tard, alors que le bus roule dans la nuit, que les garçons dorment, bercés par le trajet nocturne, ils se font soudain réveiller par un bruit de chute, suivi d’un grand cri….

    - Akasha, Akasha, murmure Bill à demi assommé, le regard halluciné.

Tom le secoue et finit par lui coller une bonne gifle pour lui remettre les idées en place.

   - Ça va mieux, tu m’as fait peur, tu devrais peut-être mettre moins de vodka dans ton jus de pomme !

   - Je te jure que je n’ai rien bu ce soir, j’ai fait une sorte de rêve ! Tu sais, j’ai vu une étrange jeune femme quand je suis sorti  du bâtiment, et depuis je n’arrête pas de penser à elle !

   - T’est amoureux ou quoi ? t’es un rapide !

   - Mais, espèce d’idiot, je l’ai vue 5 minutes à peine, mais cette nuit, c’était comme si elle était à mes côtés, elle me touchait, sa  peau était si douce, mais si froide !

Quand je lui ai demandé son nom, elle m’a murmuré : « Akasha »

   - Tu es amoureux d’un rêve ! Décidément, mon pauvre frangin, tu ne finiras jamais de m’étonner !

Georg, le plus avisé des quatre, privilège de l’âge, (il a 20ans, deux ans de plus que les jumeaux Kaulitz et 1 ans de plus que Gustav), propose de regarder sur  internet, si on trouvait quelque chose à propos de ce drôle de nom.

Aussitôt dit aussitôt fait,  Google Akasha : Akasha... La Légende... La Reine des Damnés. Avant d’être ce qu’elle est devenue, elle eut une vie humaine, comme tout vampire. Mais il y a si longtemps. Presque 6000 ans que...  La Chronique des Vampires, Anne Rice

   - Tu devrais moins lire de livres de vampires si c’est pour faire des cauchemars, dit Georg en se marrant.

   - Est-ce que tu m’as déjà vu lire ?

   - Euh non ! pas vraiment !

   - Et bien ! pour ta gouverne, je ne lis pas, cela m’ennuie !

   - Il faut que l’on retourne dormir autrement demain, on sera trop crevé pour assurer sur scène…

 

Chapitre 3

 

Je retournais à mon errance, perdue dans mes pensées, d’étranges et inhabituelles pensées, je songeais à cette rencontre, j’en vins même à me demander…….

Non ce ne serait pas raisonnable, mes nombreuses années d’existence m’ont appris que même si certains humains sont prêts à recevoir le Don, cela finit la plupart du temps en catastrophe et nous avons dû en éliminer plus d’un, qui menaçaient le secret de notre existence, car nous savons que le secret de la survie, c’est l’ignorance de l’humanité quant à la véracité de l’existence de notre espèce.

Certains des nôtres, se croyant plus intelligents, ont bafoué les règles, ils l’ont chèrement payé. Je suis la dernière, il faut pourtant que je perpétue la lignée.

Un grand fracas me ramena dans le monde réel, je vis un homme à demi assommé contre une poubelle, tandis qu’un autre se frottait les mains d’allégresse : il avait vaincu son adversaire.

Me voyant il me fit un grand sourire, je lui souris et d’un coup, l’empoignai d’une seule main, le soulevai du sol, le plaquai contre le mur le plus proche et plantant mes crocs dans sa jugulaire, je me nourris, pas trop, juste ce que je pouvais sans le tuer. Je passai ensuite ma main sur son cou, cicatrisant instantanément sa peau et ne laissant aucune marque visible, puis je pénétrai le flot de ses pensées afin d’effacer tout souvenir de notre rencontre. Son adversaire subit le même sort. Bien nourrie, je retrouvai toute ma puissance.

Je pris mon envol et me rendis à mon semblant de domicile : je vis dans des hôtels, des chambres d’hôtes, des châteaux, toujours en voyage. Les richesses accumulées par les nôtres me le permettent aisément, de plus cela évite que l’on remarque trop le fait que je ne vieillisse pas.

J’ai résolu depuis longtemps le problème du soleil, j’explique que je suis un enfant de la lune, que je suis atteinte de Xeroderma Pigmentosum (photo dermatose d’origine génétique rare, le soleil provoque des cancers de la peau et d’autres troubles graves) du coup on me plaint, on met de grandes tentures aux fenêtres et on me laisse tranquille.

La science ayant fait bien des progrès depuis l’aube de mon existence, elle m’est d’un grand secours, écran total, lentilles solaires, vêtements avec protection UV, je peux me promener de jour parmi vous sans que vous ne le soupçonniez, peut-être suis-je en train de vous suivre ………..

 

Chapitre 4

 

Après avoir roulé toute la  nuit, le grand bus gris argent des Tokio Hotel arrive à destination et se parque au sous-sol de la salle de concert.

La porte du bus s’ouvre sur un grand gaillard baraqué, cheveux grisonnants, lunettes, gaillard qui lance un.tonitruant :

   - Debout les garçons, nous sommes arrivés !

   - Pitié Saki, encore un moment, mon idiot de frère, nous a réveillés au milieu de la nuit, on est crevé !

   - L’heure, c’est l’heure, petit déjeuner dans les loges, répétition, vous pourrez toujours faire une sieste durant l’après-midi !

   - Ouais, ouais , on se lève, marmonnent les quatre garçons encore ensommeillés.

Gustav file à la salle de bain en premier, suivi de Georg, Tom et enfin Bill. Celui-ci dispose toujours de la salle de bain en dernier, car entre le maquillage et la séance de coiffure, il en a bien pour une heure et à chaque fois, cela finissait en tambourinage de porte !

Finalement, il fut décidé qu’il serait le dernier.

Un solide petit déjeuner avalé, la répétition se déroule sans problèmes. L’acoustique de la salle est excellente, le staff, bien rodé, a déjà tout préparé, le son ne sature pas. Tom ronchonne que l’on entend trop la basse de Georg, ce dernier rétorque que c’est sa guitare qui couvre tout, Gustav a encore égaré sa baguette fétiche, bref une répétition normale quand on connaît cette fine équipe.

Pour le déjeuner : spaghetti bolognaise, salade et coca,  l’un de leurs repas favoris.

Au vu des événements nocturnes, Bill s’assoupit sans même s’en rendre compte sur le canapé de la loge, cependant son sommeil est très agité, il voit et revoit toujours l’étrange jeune femme, celle qui se fait appeler Akasha, et qui lui murmure à l’oreille :

   - Viens avec moi et tu auras l’éternité !

   - Je ne comprends pas !

   - Tout te sera révélé au moment du Don !

   - Pourquoi moi ?

   - La dynastie est mourante, je suis la dernière, j’ai besoin de toi, ta musique m’a touchée…..

Il vit des larmes couler sur son beau visage, des larmes de glace. Quand il en toucha une, elle devint dans sa main un magnifique diamant de la plus pure eau. Il se sentit triste, si triste partageant cette peine immense. Il sentit les larmes couler le long de ses joues, quand subitement une secousse le réveilla, son frère, l'air très l'inquiet, avait la main sur son épaule et le secouait sans ménagement.

   - Bill, Bill tu te sens bien ? je t’ai entendu pleurer dans ton sommeil.

   - Oui, Tom ça va !

   - Parle-moi, je suis inquiet, je suis ton frère, ton jumeau, quand tu es malheureux, je suis malheureux ! Et il serra son frère dans ses bras pour le réconforter.

   - C’est cette femme, celle de cette nuit, je l’ai revue, elle est tellement triste, si seule !

   - Mais c’est un rêve, elle n’existe pas !

   - Si, elle existe ! Et il montra à son frère le diamant qu’il tenait dans son poing fermé.

 

Chapitre 5

 

Cher ami lecteur

Arrêtons-nous un instant, afin que je vous apporte quelques précisions indispensables à la suite de notre récit. 

Je ne suis pas un vampire, oui vous avez bien lu, je n’en suis pas un, du moins au sens où ce terme est couramment employé. 

Revenons quelques 200 000 ans dans le temps, à l’aube de l’humanité. D’un côté l'Homo neanderthalensis et l’Homo sapiens, dont descend l’homme actuel et de l’autre l’Homo megadermatidae, une race apparue suite à une étrange mutation génétique touchant des chauves–souris, contaminées par des météorites. 

Au fil du temps cette race se développa, prenant certaines caractéristiques propres aux humains et en gardant certaines autres propres aux chiroptères. 

Déjà à cette époque, nous fûmes traqués par les Homo sapiens, qui, se croyant au dessus de toutes les autres races, voulurent faire de nous leurs esclaves. Cela finit par un bain de sang et seule une petite partie d’entre nous survécût. Nous décidâmes de vivre cachés, en créant notre société parallèlement à celle des humains et grand bien nous en a pris. 

Nous laissâmes croire à l’extinction de notre race. De temps en temps certains des nôtres se faisant repérer, nous créâmes le mythe des vampires, un vampire est un être damné qui ne peut se reproduire, donc quand ils tuaient l’un d’entre nous, ils se croyaient à l’abri et ne songeaient pas à nous traquer. 

Pour les fans de Dracula, je vais remettre les pendules à l’heure! Je me vois dans les miroirs, un pieu ne peut pas me tuer, je ne dors pas dans un cercueil rempli de la terre qui m’a vu naître, je dors dans un lit, de préférence à baldaquin, je suis sensible au soleil, il me brûle la peau, me fait mal aux yeux, mais ne va pas me tuer pour autant. Je ne crains, ni l’ail, ni les croix, ni les églises, quant à cette histoire d’âme damnée, j’en rigole, je ne crois pas au concept de l’âme, vu que je ne crois pas en Dieu, c’est aussi simple que cela. 

Je m’appelle bien Akasha, mais je ne suis pas l’héroïne de la romancière Anne Rice, d’ailleurs, elle aurait pu trouver un autre nom que le mien pour sa Reine des Damnés, …franchement. 

Si je bois du sang, c’est tout simplement parce que mon métabolisme, génétiquement très différent du vôtre, ne digère que le sang et aucune autre enzyme et que celui des humains est celui qui me convient le mieux et me donne le plus de force. Cette différence de métabolisme fait que nous ne vieillissons pas ou si lentement que c’est imperceptible. 

Mes oreilles sont plutôt pointues et bien plus sensibles que les vôtres. Il faut bien que j’ai l’ouïe fine pour mieux vous entendre, ma force et ma rapidité sont environ cinq fois supérieures à celles d’un humain, surtout quand je viens de manger, car plus je suis affamée, plus je suis faible. 

Au summum de ma force, je peux même voler, mais avec vos saloperies de radars, je le fais de moins en moins, le progrès n’a pas que des bons côtés.  

Avec un simple contact physique, je peux guérir la plupart des blessures, que ce soit sur un animal, un humain ou l’un des nôtres. Il faut qu’il reste cependant un souffle de vie, je ne puis ramener un mort.  

Lire dans les pensées, les altérer, voire même entrer dans les rêves de quiconque, cela fait partie intrinsèque des talents de notre espèce. 

Il est temps de reprendre le fil de notre histoire……

 

Chapitre 6

 

 

Saki passa la tête par l’entrebâillement de la porte.

    - On se bouge, vous avez juste le temps de grignoter un petit quelque chose, de commencer à vous préparer, les portes ouvriront à 17 h, il y a des fans qui attendent depuis l’aube et la file dépasse le kilomètre ! 

   - Ah bon c’est à ce point ? 

   - Tu sais bien frérot qu’elles sont toutes amoureuses de toi et de ta belle voix ! 

   - Parle pour toi, elles te font toutes du charme ! 

   - Décidemment vous deux, toujours à vous chamailler !

 

Laissant les garçons à leurs préparatifs, Saki, comme à chaque fois, prit le temps de tout vérifier. Tous les autres gardes étaient à leur poste, les portes bien fermées, aucune groupie cachée dans aucun placard…c’est qu’elles sont imaginatives quand il s’agit d’essayer de rencontrer le groupe…..

Un petit tour sur scène pour une dernière vérification, tout est en place.

Des cris hystériques lui annoncent l’ouverture des portes de la salle, une nuée de filles se précipite pour être le plus près possible de la scène, malgré les nombreux avertissements de la sécurité :

 

   - ON NE COURT PAS !

Il n’y a pas plus sourd qu’une fan accro aux Tokio Hotel : faisant fi des recommandations, elles courent quand même.

La salle se remplit à vue d’œil, en même temps que le niveau sonore augmente, entre les cris, les chants et la musique en fond sonore, il faut s’accrocher.

Déjà quelques évacuations de fans, la chaleur, le manque d’eau, le stress !... Saki passe aussi par l’infirmerie, le personnel médical est sur le pied de guerre.

De l’eau est gracieusement offerte par la sécurité, aux pauvres fans des premiers rangs, au bord de l’évanouissement. C’est à peine suffisant.

 

   - Plus qu’une heure les garçons !

Du côté des membres du groupe, l’excitation est à son comble. Il n’y a rien de plus stimulant que les cris des fans et leur plaisir d’être sur scène n’en est que plus palpable, ils adorent cela.

Qui n’adorerait pas ?

Chacun se prépare à sa façon, Tom écoute de la musique le casque vissé sur la tête, Gustav médite tranquillement dans son coin, tandis que Bill et Georg peinent à maîtriser leur trac et papotent de tout et de rien, histoire de se vider la tête.

 

Le grand moment !

Les lumières de la salle s’éteignent, les fumigènes ouvrent le bal, les spots prennent le relais, les cris redoublent, le décor se soulève et c’est par Übers Ende der Welt que commence une heure et demie de communion entre la musique et le public, un moment magique, un moment hors du temps, aussi bien pour le groupe, que pour le public.

Les chansons se succèdent à un rythme effréné, toute la salle vibre au rythme de la musique et reprend en cœur les refrains pour le plus grand plaisir de Bill, pour qui chanter c’est vivre et vivre c’est chanter. Tom semble comme en extase et donne une émotion particulière au son de ses accords de guitare. Gustav, quant à lui est déchaîné, sa batterie en tremble, lui qui semble plutôt calme, ne l’est plus du tout avec des  baguettes dans les mains. La basse de Georg en apporte la touche finale.

 

Un peu cabotin, comme à son habitude, Bill tient de grands discours à ses fans. Il sait parfaitement que peu d’entre elles comprendront, aussi a-t-il appris quelques phrases de base dans la plupart des langues.

   - Bonsoir tout le monde !

   - Grands cris hystériques

 

   - Ca va ?

   - Ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiii !!!!!!

   - Nous sommes très heureux d’être ici ce soir !

   - Aaaaaaaaaahhhhhhhhh

Il n’hésite pas à faire chanter le public, qui le suit de bon cœur.  Il adore ces moments de partage et son public le lui rend bien. Il se donne à fond, se déplace sur scène à gauche, à droite, grimpe auprès de Gustav, tout est parfaitement rodé, chacun sait où il doit être et à quel moment, il y a toujours un peu d’improvisation, mais moins qu’il n’y paraît de prime abord.

 

 

Il n’hésite pas à faire monter sur scène une jeune fille et à chanter avec elle la fin de Schrei, elle s’en souviendra toute sa vie.

Dans un flamboiement de confettis d’argent, Ich bin da termine cette soirée, qui pour les fans restera pour toujours gravée dans leur cœurs.

Une ovation salue leur départ de scène et retentit longuement, alors qu’ils ont déjà regagné leur loge.

   - Super concert !

   - Ils sont adorés !

   - Nooooon, tu crois ?

   - J’adore chanter !

   - On le sait ….

   - Je vais prendre un peu l’air.

 

Chapitre 7

 

 

Forte de mon copieux repas de la veille, je planais, tel un oiseau, mon long manteau noir flottant autour de moi, si vous saviez le plaisir que l’on ressent à voler au clair de lune, à être libre, libre……

Je pensais encore au jeune homme rencontré la veille, j’en avais même rêvé durant la nuit, je lui parlais et lui confiais ma peine, quel cœur pur, quelle âme lumineuse, j’ai ressentis une telle gentillesse en lui, on aurait dit qu’il voulait partager ma souffrance, il me fascinait, mais je ne connaissais que trop bien les risque, le Pouvoir corrompt les âmes les plus pures, il m’en a déjà tant coûté sur l’autel du sacrifice.

Je perçus au loin les échos d’une musique, la même qui m’avait tant plu, je savais que ce n’était pas raisonnable, mais ce fut plus fort que moi.

Dans une petite cour intérieure, un banc dissimulé sous un saule pleureur semblait m’attendre, je me posais doucement à proximité et profitais de la musique, quelque peu couverte par d’atroces hurlements féminins, quel dommage.

Je ne comprenais rien aux paroles, je reconnus cependant la langue de Goethe, que je n’appréciais pas particulièrement en temps normal, mais chantée par cette voix d’ange, c’était magnifique.

Les yeux fermés, je goûtais au plaisir de la brise sur mon visage, du calme de la nuit, la musique avait cessé sans que j’y prenne garde, quand je sentis une présence à mes côtés.

C’était lui, nous restâmes plusieurs minutes sans parler à nous observer mutuellement, sa coiffure n’avait pas changé, par contre le maquillage était plus discret, jeans, ceinture cloutée, veste de cuir et ongles noirs.

Je le vis écarquiller des yeux d’étonnement, je me rendis compte que mes cheveux ne couvraient pas mes oreilles pointues, je lui souris et remis mes cheveux en place avec un haussement d’épaule.

 

   - Akasha ?

   - Tu connais donc mon nom ?

Il me regarda d’un air interrogatif, il ne me comprenait pas

   * N’aies pas peur, nous pouvons parler par la pensée, ainsi nous nous comprendrons sans peine*

Il sursauta violemment, je posais une main apaisante sur son épaule, souris et le rassurait mentalement

   * Tu connais donc mon nom *

   * Oui, je t’ai vue dans un rêve *

   * Je suis désolée, je ne voulais pas te troubler *

   * Je n’étais pas sûre que tu sois réelle *

   * Je le suis bel et bien *

   * Au fait, je m’appelle Bill *

   * Enchantée Bill, je suis Akasha, mais tu le sais déjà *

   * C’est toi qui chante, c’est très  beau ?

   * Oui, j'écris les chansons et Tom, Georg et Gustav composent la musique *

   * C’est beau, c’est dommage que je comprenne pas *

   * Cela parle de la vie, du suicide, de la drogue, de l’amour, du divorce *

   * De la souffrance, je comprends pourquoi cela me touche tant *

   * Est-ce que tu es un  vampire ? sous Akasha sur internet…….*

   * Non, les vampires cela n’existe pas *

   * Pourtant tu es plutôt bizarre *

   * Et toi donc *

 

On se mit tous les deux à rire, je me sentais  bien en sa compagnie, en confiance, je lui fis promettre de ne rien révéler de tout ce que je pourrais lui raconter, une sorte de test de confiance, s’il manquait à sa promesse, je le saurai immanquablement…….

J’entrepris de lui raconter l’histoire de mon peuple, il manifesta un grand étonnement, mais m’écouta jusqu’au bout sans m’interrompre et sans que je ne ressente de scepticisme dans son esprit, à la fin, je me tus et le laissais libre de m’interroger.

   * Tu es la première de la Lignée ? *

   * Non, je ne suis pas née du peuple, j’ai reçu le Don de l’une des dernières encore en vie de la Première Lignée, je n’ai pas 200 000 ans, mais j’ai connu l’Atlantide et ce n’est pas une légende…..

A l’origine les nôtres se reproduisaient normalement, quand ils étaient encore mi-chauve-souris, mi-humain, lorsqu’ils furent quasi humains ils ne le pouvaient plus, car leur métabolisme était trop lent, vivre éternellement et se reproduire ce n’est pas possible, c’est là qu’apparût le Don.

Le Don, c’est un partage total, non seulement du sang, mais de l’esprit, on boit le sang en ne laissant qu’un souffle de vie, on le métabolise et le réinjecte, à ce moment la mémoire de la race sera transmise, la mutation génétique s’accomplira et les âmes, les pensées du donneur et du receveur seront liées pour l’éternité *

   * Tu as déjà partagé le Don *

   * Oui, c’était, il y a bien bien longtemps, je l’aimais tellement …*

 

Je me mis à pleurer doucement, Bill me prit la main dans une vaine tentative de réconfort.

   * Il n’a pas respecté la Régle d’Or des nôtres, vivre dans l’ombre, il a voulu dominer les humains, dominer le monde, il se croyait invincible, j’étais responsable de lui, puisque je lui avait fait le Don, j’ai du….*

Mes larmes coulèrent de plus belles…

   * J’ai du le tuer des mes propres main * pensais-je très doucement

   * J’en ai tellement souffert que depuis, je suis restée seule, cela fait bien longtemps, plus de 5000 ans, les autres, tous les autres ont péri au cours des millénaires, ils se sont entretués ou ont été tués par des humains. Il est très difficile de nous détruire, mais pas impossible *

Il me serra dans ses bras et me berça doucement en chantonnant……l’aube commençait à poindre, il valait mieux que je parte, je lui rappelais sa promesse, il me dit qu’il ne cachait rien à son frère jumeau, ainsi qu’à Georg et Gustav.

   * S’ils parlent, ce sera peut-être ma perte et tu en seras responsable, réfléchis bien aux conséquences *

Je m’en allais, le laissant pensif sur le banc, non sans lui avoir promis que l’on se reverrait bientôt.

 

 

 

Chapitre 8

 

 

Bill rejoignit les loges et se fit houspiller par Saki, très fâché de sa disparition.

   - C’est quatre heures du matin, tu étais où ?

   - Je me promenais !

   - Tout seul, sans garde, tu sais que tu ne dois pas et encore moins sans prévenir ! Tout le monde était inquiet, surtout Tom, en plus tu ne répondais pas sur ton portable !

   - Je l’avais oublié

   - A quoi ça sert d’en avoir un, si c’est pour l’oublier ?

   - Je prends vite mes affaires !

   - Pas besoin, on a déjà mis toutes tes affaires dans le bus qui aurait dû partir depuis plusieurs heures

Bill fila sans demander son reste avant une autre leçon de morale. À peine eut-il franchi la porte, qu’il fut assailli par une tornade de questions.

 

   - T’étais où ?

   - T’as fais quoi ?

   - T’as couché avec une groupie ?

   - J’ai juste été faire un tour et je n’ai pas vu le temps passer, je suis désolé, je suis crevé, je vais me coucher.

Non seulement il était fatigué, mais il espérait ainsi échapper aux questions de ses amis et de son frère. Il fallait qu’il réfléchisse : tout leur révéler ou se taire ? Quel dilemme, quelle responsabilité !

Sa nuit fut entrecoupée de rêves et de cauchemars. Au petit matin, enfin vers 10 heures pour lui, il se réveilla sa décision prise : il se confierait à Tom uniquement, il fallait qu’il partage ça et son frère jumeau serait le plus à même de le comprendre et de le conseiller.  

Ce soir pas de concert, il faut bien que le groupe se  repose un peu, une tournée c’est très fatigant, deux à trois soirs de concerts de suite au maximum et au moins un jour de repos, voire plus, donc quartier libre.

Durant l’après midi, il s’arrangea pour être seul avec Tom et lui raconta en détail sa soirée, Tom se moqua de lui :

   - Tu t’es fait mener en bateau par une groupie !

   - Non, je te jure que non !

   - Elle te l’a joué mystérieux pour que tu succombes à son charme !

   - Elle m’a parlé dans ma tête !

   - Ben voyons, tu as encore abusé de vodka !

   - Je n’avais rien bu, d’ailleurs elle m’a promis de revenir, je veux que tu la rencontres.

   - Je te prouverai que c’est un canular !

L’après-midi s’acheva par un interminable shopping, interminable surtout pour Georg et Gustav, Bill et Tom s’en donnaient à cœur joie, les deux gardes chargés de leur protection se retrouvèrent vite noyés par les sacs de boutique de fringues et autres babioles.

 

Ils s’arrêtèrent dans une petite pizzeria, peu fréquentée, pour dîner en toute discrétion. Hélas quand on s’appelle Tokio Hotel, ce n’est pas chose aisée, une jeune fille les reconnut, vint leur demander un autographe, ils jugèrent plus prudent de prendre des pizzas à emporter et de filer avant un raz-de-marée de fans hystériques.

La plupart du temps, leur bus aménagé prend la route vers minuit, afin de profiter du calme de la nuit pour rouler, pour éviter aussi  les courses poursuites avec les fans ou les taxis. Le lendemain étant une journée libre, ils choisirent de faire un  peu de tourisme, à mi-chemin du lieu du prochain concert et de ne s’y rendre que la nuit suivante.

Par cette  belle nuit étoilée, ils firent halte près d’un étang, en lisière de forêt, à l’écart de tout. Laissant Georg et Gustav  jouer aux cartes,  Bill et Tom s’en vont vadrouiller au bord de l’eau, un bain de minuit peut-être…..

 

Quand ils furent hors de vue du bus :

   * Bonsoir Bill, bonsoir Tom *

   * Bonsoir Akasha * pensa gentiment Bill, alors que Tom réfrénait un sursaut.

Ils se retournèrent de concert pour me voir flottant à un mètre du sol, tout de noir vêtue, les cheveux aux vents, ma peau opalescente luisait à la lueur des étoiles.

   - Ben ça alors, dit Tom qui n’en croyait pas ses yeux !

   - Il te faut parler pas la pensée, elle ne te comprend pas.

   - Détrompez-vous, je vous comprends parfaitement.

   - Mais hier tu m’as dit que tu ne parlais pas allemand !

   - Hier, c’était hier, depuis j’ai appris.

   - Quoi en une journée ?

   - Pour moi, c’est facile et cela sera moins perturbant  pour vous.

Je descendis jusqu’à toucher le sol et marchai jusqu’à eux, Tom m’observait, je ressentais sa méfiance, je lui souris, il vit mes crocs et mes oreilles, je perçus alors de la peur : pour lui et pour Bill.

   - Ne me crains point, je ne te veux pas de mal.

   - Tu es dangereuse !

   - Non, je ne suis pas un danger pour vous, c’est vous qui êtes un danger pour moi.

Ma réponse laissa Tom très perplexe, mais je sentais que je n’aurai jamais avec lui, la même relation qu’avec Bill, qui était plus ouvert au fantastique et à la magie, donc plus apte à m’accepter. Tom était plus terre à terre.

 

 

Chapitre 9

 

Quand je fus partie, Tom et Bill se disputèrent violemment à mon sujet.

   - T'es dingue, elle n’est pas humaine !

   - Elle souffre, elle est gentille.

   - Elle te manipule et veut quelque chose de toi !

   - Elle ne m’a rien demandé !

   - Ça va venir, tu ne perds rien pour attendre !

   - Mais pourquoi tu vois le mal partout ?

   - Je ne vois pas le mal partout, je suis réaliste, moi ! J'ai les pieds sur terre, pas comme certains.

   - Tu es jaloux !

   - Jaloux de quoi ? Qu’une horrible créature se soit entichée de toi ?

   - Elle n’est pas horrible, elle est belle !

   - Il te faut des lunettes ma parole! Tu n’as pas vu ses oreilles en pointes et ses crocs! On dirait Dracula en fille !

   - Et alors, peut-être que nous aussi pour elle on est horrible ?

   - Là n’est pas la question, elle est dangereuse.

   - Je te dis que non !

   - Je te dis que oui !

Gustav et Georg, attirés par le bruit de la dispute arrivèrent sur ces entrefaites et assistèrent à la fin de ladite querelle.

   - Ça va pas, on vous entend à un kilomètre !

   - Qui est dangereuse ?

   - Akasha, répondit Tom.

   - D’abord un ce n’est pas vrai et de deux, la ferme! C'est personnel.

   - On ne comprend rien à ce que vous racontez.

   - Bill s’est entiché d’un vampire !

   - C’est même pas vrai. Et ta promesse ?

   - Ils ont le droit de savoir, on est un groupe, on est amis!

   - Je sais, mais je voulais que cela reste entre jumeau pour le moment.

   - C’est trop grave !

   - Mais qu’est-ce qui est si grave, demandèrent en chœur Gustav et Georg.

Et Tom leur raconta tout, les confidences de Bill, la rencontre avec Akasha, sa vraie nature, ses pouvoirs, devant un Bill, atterré par la trahison de son frère. Il aurait fini par tout leur raconter, mais il attendait encore un peu, il pensait préparer le terrain. Il savait bien qu’il était le seul du groupe capable d’accepter Akasha sans condition, sans peur, pour ce qu’elle était, mais de là à ce que son propre frère, son jumeau, le trahisse. Il se sentit à la fois en colère et blessé. Il les planta là, sans plus de cérémonie, et alla s’enfermer dans le bus.

Tom comprit qu’il s’était mis son frère à dos et que ce dernier ne le lui pardonnerait pas. Il ne savait pas s’il devait regretter ou pas cette trahison.

   - Je me demande si j’ai bien fait de tout vous raconter ? Il m’en veut à mort !

   - Nous sommes amis, nous sommes un groupe, nous partageons presque tout depuis des années.

   - Je sais, mais je l’ai trahi !

   - Pour la bonne cause !

   - Peut-être, mais il est tellement fâché, j’ai peur qu’il ne me pardonne pas.

   - Il a toujours fini par te pardonner, tu es son frère.

   - Mais cette fois, c’est plus grave, je ne l’ai jamais vu dans un état pareil !

   - Tu penses vraiment qu’elle est dangereuse ?

   - Tu l’aurais vue planer à un mètre du sol et ses crocs, brrr, j’en ai encore la chair de poule !

   - Il faut en parler à Saki.

   - Ça va pas vous deux ! Pour le coup Bill, il va péter un câble !

   - Qu’est-ce qu’on fait ?

   - On prie pour qu’il nous ouvre, on va dormir et on les surveille tous les deux.

 

Chapitre 10

 

 

J’attendais comme souvent, la fin du concert, le moment le plus propice à nos bavardages nocturnes. Bill filait à l’anglaise et venait me rejoindre pour quelques heures.

Je perçus l’écho d’une violente altercation et un sentiment de malaise m’envahit. En quelques secondes, je fus sur les lieux. Bill était étendu au sol, un poignard planté dans la poitrine, animé d’à peine d’un souffle de vie.

Je ne pouvais pas le guérir, le cœur était atteint, seul le Don pouvait encore le sauver. Sans perdre de temps, je plantai mes crocs dans sa jugulaire, aspirai presque tout son sang, heureusement le couteau, toujours dans la plaie, avait empêché qu’il en perdît trop, je le métabolisai et le lui retransmis, enrichi des gènes de la Lignée et de régénérescence cellulaire propre à notre race.

Son corps se convulsa : au moment de la mutation, la souffrance est intolérable. Je le serrai dans mes bras et ouvrant mon Esprit, je partageai sa douleur, son passé, tandis que de son côté il acquérait toutes les connaissances de la Lignée et celles de ma longue, très longue vie.

Cela sembla durer une éternité pour nous, alors que quelques minutes à peine s’étaient écoulées.

Il était trop tard pour revenir en arrière, je priais instamment pour avoir fait le bon choix et surtout qu’il ne m’en veuille pas. Peut-être eut-il préféré mourir ?

Je l’observais, tandis qu’il reprenait petit à petit ses esprits, sa peau était plus pâle, ses oreilles légèrement pointues, moins que les miennes, tant mieux et ses crocs semblables aux miens.

   - Ne m’en veux pas, mais je ne voulais pas te perdre !

   - Je n’étais pas prêt.

   - Je ne crois pas que l’on puisse être prêt un jour, on ne se rend compte de tout ce que cela implique, que lorsque l’on a reçu le Don!

   - Je préfère rester seul, va-t-en ....

La mort dans l’âme, je le laissai seul, je le comprenais. J’avais ressenti la même souffrance, je m’étais posée les mêmes questions, il y a des cela  bien des millénaires.

Il allait passer des heures à explorer la Mémoire de la Race, afin des trouver des réponses à toutes ses questions et quand il aurait tout assimilé, il me rejoindrait…..

Un  nouveau monde allait s’ouvrir à lui, il aurait l’éternité, il volerait, lirait dans les esprits, pourrait guérir et bien  d’autres choses encore, qu’il découvrirait au fil du temps et qu’il apprendrait à maîtriser après avoir sûrement commis quelques impairs, du genre cassage de porte ou gérer une force surhumaine, c’est le plus dur, sans oublier quelques atterrissages tumultueux.

La gestion des capacités de notre race n’est pas innée pour ceux qui reçoivent le Don, il faut apprendre à les manipuler et en douceur si possible. Je me frottai machinalement l’épaule, souvenir encore présent, d’un malencontreux vol, ayant fini dans un chêne. Depuis j’évite de choisir de me poser dans une toute petite clairière au centre d’une forêt, j’évite même les forêts pour tout dire.

Je rentrai à l’hôtel, sachant qu’il saurait où me trouver, puisque dorénavant ses pensées étaient miennes et les miennes n’avaient pas plus de secrets pour lui.

Toute la nuit et la journée suivante, les turpitudes de son esprit me tinrent éveillée, j’essayai tant bien que mal d’apaiser ses tourments, mais c’est comme s’il refusait mon aide. Il se complaisait dans la douleur, il regrettait son humanité perdue, mais savait pertinemment que sans le Don, il serait mort. Il devait donc accepter, d’une certaine façon, d’être mort puis revenu à la vie.

Personne ne pouvait le faire pour lui.

Je craignais aussi la réaction de Tom, il ne m’aimait pas et m’accuserait sûrement d’un quelconque complot et d’être complice de la tentative d’assassinat perpétrée à l’encontre de Bill. J’y étais pourtant totalement étrangère.

 

 

 

Chapitre 11

 

 

Tom, Gustav et Georg entreprirent de suivre discrètement Bill, afin le surveiller et de le protéger d’Akasha le cas échéant.

Le soir suivant, voyant  Bill quitter discrètement la salle de concert, ils s’arrangèrent pour détourner l’attention de Saki, en lui laissant croire qu’une groupie se cachait dans les toilettes. Échappant ainsi à sa vigilance, ils empruntèrent, quelques minutes plus tard, le même chemin que Bill.

Trop tard hélas, pour éviter le drame, mais juste assez vite pour en suivre le déroulement.

Ils virent un jeune homme se précipiter sur Bill et l’invectiver violement en allemand :

   - Tu m’as volé ma copine !

   - Je ne connais pas ta copine.

   - Mais toi, elle te connaît, elle n’en a plus que pour toi : Bill par ci, Bill par là, je n’existe plus.

   - Je ne suis pas responsable si ta copine aime notre musique.

   - Si c’était que ça, c’est toi qu’elle aime et je ne peux pas le tolérer....

Il empoigna Bill d’une main et de l’autre lui planta un poignard dans la poitrine, avant de prendre ses jambes à son cou.

Les garçons se précipitèrent vers Bill, mais la vue d’Akasha tombant du ciel à côté de lui, les stoppa net dans leur élan. Ils n’étaient qu’à quelques mètres à peine, dissimulés par un gros container à ordures, ils pouvaient observer à loisir la scène sans être vus.

Ils comprirent qu’elle l’avait ramené à la vie, mais qu’il ne serait plus jamais le même. Ils ne savaient pas s’ils devaient lui en vouloir ou pas et se mirent à chuchoter entre eux :

   - Tu as vu ce qu’elle a fait !

   - Oui, je crois que cela s’appelle le Don ! Si j’ai  bien compris ce que mon frère m’a dit.

   - Tu crois qu’il était mort ?

   - Non, mais presque !

   - On aurait pu le sauver ?

   - Il faudra lui demander ! Mais je pense que si elle a fait cela, c’est qu’elle n’avait pas le choix.

   - Tu crois ? Elle a peut-être profité de l’occasion, je crois qu’elle est attirée par lui.

   - Et alors ? Tu as vu comme Bill l’a chassée, elle ne doit pas être ravie !

   - On fait quoi ?

   - J’en sais rien.

   - On va lui parler ?

   - J’ai peur !

   - Tu as peur de ton frère ?

   - Il n’est plus comme avant, ce n’est plus mon frère.

   - Si, c’est toujours ton frère !

   - Non, c’est une créature comme elle !

   - Tu aurais préféré qu’il soit mort ?

   -Je ne sais pas ....

Bill avait la tête qui tournait, il ne savait plus ni qui il était, ni où il en était. Son cerveau, en ébullition, tentait d’assimiler La Mémoire de la Race : tout se mélangeait dans sa tête.

Il marcha péniblement jusqu’à un banc, s’assit et mit sa tête entre ses mains, laissant le temps faire son œuvre et ses pensées retrouver une certaine cohésion.

Comment les autres allaient-ils réagir ? Ils vont me détester, avoir peur de moi. Je retourne auprès d’eux ou je rejoins Akasha ?

Il repensa à tout : sa famille, son frère jumeau qui l’avait trahi, son passé, ses amis, le groupe, la musique, le succès, la scène, les fans, Akasha, le Pouvoir, le Don, l’éternité, voler, il se sentait déjà tellement différent....

Quelques heures plus tard sa décision était prise !

 

Chapitre 12

 

 

Le lendemain soir, toujours sans nouvelles de Bill, je commençais à m’inquiéter. Mentalement je tentai d’entrer en contact avec lui, afin de le localiser, il ne fallait pas qu’il demeure seul trop longtemps.

Tout ce que je réussis à percevoir fut un mélange de pensées chaotiques, l’assimilation est une épreuve pénible.

N’arrivant pas à savoir exactement où il s’était réfugié, je me résolus à me connecter à l’esprit de Tom. L’ayant fait une fois, ce fut un jeu d’enfant. Enfer et damnation ! Il était lui aussi mort d’inquiétude. Bill était introuvable, pire encore, ils avaient dû annuler le concert de la soirée, c’était donc plus grave que ce à quoi je m’attendais.

Je localisai Tom facilement, il fallait que je le voie. J’appréhendais cette rencontre, mais je la savais indispensable.

Je sortis de mon hôtel, passant par de sombres ruelles, j'en profitai pour me nourrir du premier homme de robuste constitution que je croisais. J’aurai bien besoin de toutes mes forces, la nuit allait être longue…

Je me posais sans bruit près du bus et, prenant mon courage à deux mains, je frappais doucement à la porte. Elle s’ouvrit sur un grand jeune homme aux longs cheveux bruns, visiblement fâché, qui posa de grands yeux gris-vert sur moi et marmonna :

 

   - Quoi encore ?

   - Je suis Akasha, il faut que je parle à Tom.

   - Entre ! Il me laissa passer, tout en m’observant attentivement à la recherche de je ne sais quoi....

   - Je ne sais pas par où commencer ?

   - Ne te fatigue pas ! On sait tout, on a vu ce que tu as fait à mon frère !

   - Je suis désolée, c’était cela ou il mourait.

   - Tu es certaine que tu as fait le bon choix ?

 

Je pâlis, si tant est que je puisse pâlir, au vu de la blancheur laiteuse de ma peau.

 

   - Tu ne penses quand même pas que je l’aurais fait si j’avais pu l’éviter ?

   - Je n’en suis pas si sûr !

   - Tu ne sais rien de moi et tu me juges sans comprendre.

   - Tu le voulais pour toi et tu l’as eu !

Là je me décomposai littéralement, mes yeux flamboyèrent sous la colère mêlée de tristesse que ces paroles provoquèrent en moi. Je les toisai les uns après les autres et désignant le sol :

 

   - ASSIS ,  ordonnai-je sur un tel ton que je fus obéie instantanément.

Je m’assis à leurs côtés,  nous formâmes un cercle et je leur demandai de se tenir par les mains. Quand toutes nos mains furent jointes, je leur expliquais mentalement ce que nous allions tenter :

   * Bill m’a acceptée sans me juger avec mes différences, alors que vous, vous êtes trop terre à terre. Vous me jugez sans rien connaître de moi ou si peu, vous voyez le mal, là où il y a seulement de l’amour. Je vais tenter quelque chose, que je n’ai jamais osé tenter, même si je sais qu’il est possible de le faire. Cela causera  peut-être ma perte, mais au moins j’aurai essayé. Vous, vous ne risquerez rien, je serai la seule en danger. Je vais vous emmener loin, très loin dans mon passé, il y a plus de 5000 ans du temps de la première dynastie, à This en Egypte. Vous aurez l’impression de vraiment y être, mais ce ne sera pas réel, tout est déjà vécu.*

Une sensation d’intense chaleur, de suffocation nous envahit, nous étions tous les quatre debout sur un sol aride et rougeâtre, au milieu d’une sorte de marché de rue très animé. Je leur fis signe de me suivre jusqu’à une échoppe, leur désignai un magnifique jeune homme musclé, à la peau très brune, aux traits fins et aux splendides yeux noirs, de longs cheveux tressés glissant sur son beau visage, tandis qu’il s’affairait à ciseler délicatement un bracelet d’or : Séthi.

Je les emmenai ensuite près d’un bosquet d’arbres, où un couple enlacé s’embrassait au clair de lune. Ils reconnurent Séthi et quand le visage de la femme se tourna, c’était le mien. Observer des êtres qui s’aiment autant, fait en général chaud au cœur, quant à moi, je souffrais le martyr. Je gardai les yeux clos, ils me virent partager le Don avec celui que j’aimais de toute mon âme.

Puis nous arrivâmes dans une grotte, où à grand renfort de discours et usant du Pouvoir, Séthi complotait pour renverser le pharaon Ménès, afin de gouverner sur l’Egypte.....

Convoquée par les Anciens de la Lignée, je fus enjointe de détruire Séthi. Il avait enfreint la Règle d’Or, il aurait dû rester dans l’ombre, il le savait, mais sa soif de pouvoir était trop forte. Si je ne cédais pas, je serais mise à mort et lui ensuite. Mon  sacrifice ne le sauverait point.

La mort dans l’âme, je lui ôtai la vie.

Des larmes de sang coulaient sans fin le long de mon visage.

Nous revînmes dans le présent, toujours assis en cercle dans le bus. Mon visage était rougi par les mêmes larmes et un petit tas de rubis gisait à mes pieds, je les pris, les offris à Tom en lui disant :

   - Voici le prix de ma souffrance, de mon amour perdu !

Ils comprirent, tous trois, que ce que j’avais fait pour Bill, m’avait coûté cher,  bien plus cher en souffrances, que tout ce qu’ils pourraient subir leur vie durant.

Tom se mit à pleurer et me serrant dans ses bras, et murmura :

   - Partage le Don avec moi et je le ramènerai, c’est mon frère, mon jumeau, je saurai le ramener.

 

Chapitre 13

 

 

Bill ressentit le besoin impérieux de se ressourcer, de retourner à ses racines, à son enfance, aux prémices de Tokio Hotel, à la période Devillish, il y a un peu plus de 6 ans, avant les tournées, le marketing, le stress perpétuel.

Encore en bisbille avec la mémoire de la race, il n’osa pas tenter de voler. Il se contenta de se rendre à la première gare et de sauter dans un train, direction Hambourg, puis Magdeburg et enfin Loitsche, un pèlerinage en somme...

Seul dans  un wagon de première classe, appuyé contre la vitre et regardant défiler le paysage sans vraiment le voir, il était perdu dans ses pensées.

La découverte de la musique, le plaisir de jouer de chanter, d’écrire des chansons, sa complicité avec Tom, son jumeau, sa moitié, sa rencontre, avec Georg et Gustav, dans un petit club à Magdeburg, un week-end alors qu’il se produisait sur scène avec Tom, rencontre qui déboucha sur une grande amitié et qui vit naître leur groupe : Devillish.....

Inspiré par les sentiments : amour, amitié et jalousie, par les souffrances aussi : le divorce, le suicide, la drogue, il a puisé dans la vie, les textes de ses chansons. Le plaisir de chanter demeure en lui, il fredonne doucement ……

Il revoit les parties de fou rire avec Tom, Gustav et Georg, ses complices, ses amis.

Les moments plus douloureux aussi, comme le divorce de ses parents…..

Le train entre en gare ; « Magdeburg, fünf minuten »

Il est très tard ou très tôt, c’est au choix, la gare est quasi vide.

* Au moins personne ne va me reconnaître et c’est tant mieux. Une horde de groupies serait la pire chose qui puisse me tomber dessus, si tant est qu’il puisse m’arriver pire que la situation dans laquelle je me trouve ! Que va devenir le groupe ? C’est plus possible, maintenant je ne vieillirai plus, ils ne vont jamais l’accepter! Et Tom, déjà qu’il a trahi ma confiance, ne pourra plus m’aimer, je ne suis plus son frère jumeau, nous n’avons plus les mêmes gènes.

Je ne me sens plus moi-même, c’est atroce.

Mais pourquoi moi ? J’avais tout pour être heureux ou presque !

Maintenant tout est sens dessus dessous.

Pourquoi ai-je croisé la route de cette créature maudite ?

Pourquoi cet imbécile m’a poignardé ?  ….. que de questions sans réponse ………

La tête me tourne, je suis fatigué, j’ai faim! Quelle chance, un distributeur automatique. Je sélectionne une barre chocolatée que j’engouffre en toute hâte, abomination : une atroce douleur me tord les entrailles, mon estomac se révulse, refusant d’assimiler pareille nourriture ! Eh ! Merde, je ne peux même plus manger de chocolat ! *

Bill se concentra, faisant appel à ce méli-mélo de souvenirs disséminés dans son crâne et comprit qu’à part du sang humain, il ne pourrait plus jamais rien avaler d’autre.

La rage au cœur, « Maudite soit Akasha! » il partit en quête d’un quidam, afin de calmer sa faim. Ce n’est pas si mauvais finalement ! Cette impression de force, de puissance, ce serait même agréable au demeurant.

Comme enivré, Bill se mit à courir vite, encore plus vite, si bien qu’en moins de 10 minutes, il parcourut les 24 km, reliant Magdeburg à Loitsche.

Perturbé par sa performance, encore un peu étourdi, il vit avec inquiétude l’aube poindre à l’horizon. Il lui fallait trouver rapidement un abri. Il repensa avec nostalgie à la cabane dans les bois, leur refuge « à la Tarzan », construit quand ils étaient encore des gamins…..

Cela ferait l’affaire en attendant mieux.

 

 

Chapitre 14

 

 

Mon esprit plongea jusqu’au tréfonds de l’âme de Tom, sa demande était motivée par l’amour, un amour inconditionnel pour son jumeau, sa moitié, il avait choisi.

Bill n’avait pas eu cette opportunité, son âme n’était pas suffisamment prête, son esprit et son corps, modifiés par mes gênes n’étaient plus en accord. Je le savais en danger, il aurait besoin de tout le soutien possible.

Je m’écartai de Tom. Longtemps nous restâmes les yeux dans les yeux, il était prêt.

Je partageai le Don, l’Esprit et la Souffrance, tout était lié dans ce rituel inhabituel. Le Don était lié à l’amour, on le partageait avec ceux que l’on aimait et Tom ne m’aimait pas ……

A l’instar de son frère, son corps et son esprit se modifièrent.

Gustav et Georg mirent du temps à se ressaisir, ils n’avaient pas vraiment compris la prière de Tom, murmurée à mon oreille et ils m’invectivèrent :

   - Non, mais ça va pas ! Bill et maintenant Tom, tu les cumules, les conneries !

   - Je………..

   - Les gars, on se calme, c’est moi qui lui ai demandé.

   - Hein, mais t’es taré !

   - Non, je suis le seul à pouvoir aider Bill et je devais devenir comme lui.

   - Et, toi tu as accepté de le transformer ?

   - Oui, l’amour était sa motivation première, le Don implique de l’amour, sans amour pas de Don.

   - N’importe quoi !

    - Tu pourrais partager ton âme, ton esprit avec quelqu’un que tu n’aimes pas ?

   - Euh…….

   - Le Don est une fusion totale, c’est transcender l’amour.

   - Mais tu n’es pas amoureuse de Tom ?

   - Non, mais j’aime Bill et Tom aime tellement Bill, que cela a rendu le Don possible.

   - Bon, trêve de blabla. Gus, Georg, vous vous débrouillez pour occuper Saki, il ne doit rien savoir. Moi je pars avec Akasha pour ramener  Bill.

Dans la fraîcheur de la nuit, Tom et moi partîmes en quête du lieu où se terrait Bill, mais avant il était indispensable d’avoir suffisamment de force pour voler.  Les humains aimant se balader par deux, chasser à deux permet de trouver plus vite de quoi se nourrir.

Tom, instinctivement, réussit à saisir sa proie et à lui prendre ce qu’il pouvait de sang sans la tuer. Comme moi, il effaça toute trace physique et mentale, du corps et de l’esprit de sa victime. Il assimilait très rapidement la mémoire de la race, j’en fus fière et lui sourit.

Me rendant mon sourire, il me dit qu’il se sentait prêt pour voler, il pensait savoir où son frère s’était réfugié.

Nous volâmes plusieurs heures, jusqu’à survoler une bourgade en pleine campagne allemande, Loitsche. J’aurai dû y penser, il était retourné à ses origines. Tom, sans hésiter, se dirigea vers un petit bois. Comprenant ses intentions, je le retins et le forçai à se poser à côté.

   - Il y a une clairière dans les bois et notre cabane est juste à côté.

   - Il vaut mieux marcher.

   - On aurait pu se poser dans la clairière.

   - Tu t’es déjà pris un arbre ?

   - Euh non !

   - Eh bien le jour où cela t’arrivera, tu repenseras à mon conseil et tu éviteras les clairières.

   - Hi, hi, hi ! Il se mit à pouffer de rire, s’étant plongé dans la mémoire de la Lignée, il avait assisté à mes déboires forestiers.

   - C’est pas gentil de te foutre de moi.

   - Oui, mais c’est trop drôle !

   - Tu ne perds rien  pour attendre .....

Gentiment je lui assenai une bourrade, qu’il me rendit, évitant l’épaule qui avait gardé certains souvenirs d’un non moins certain chêne.

De concert, nous marchâmes vers la cabane de leur enfance, en  papotant. Tom me raconta les tribulations de son enfance, je les connaissais déjà, mais je le laissai parler, il en avait besoin.

Effectivement Bill était bien là. Quand il vit son jumeau, il courut vers lui et le serra dans ses bras. Il l’observa longuement, il avait compris. Le regard glacial qu’il me lança ensuite, me fit froid dans le dos, sa haine envers moi était palpable.

Je partis sur le champ, la mort dans l’âme et le cœur brisé.    

 

 

Chapitre 15

 

 

Les deux frères s’observaient, aucun n’osant rompre le silence le premier. Finalement Tom fit le premier pas, il saisit la main de Bill et l’entraîna dans la cabane, où ils s’assirent face à face.

   - Bill !

   - Tom ! Ils avaient parlé en même temps, ils éclatèrent de rire.

   - Alors frérot, on retrouve ses vieilles habitudes !

   - On ne se refait pas !

   - Tu ne dois pas lui en vouloir .

   - De quoi tu parles ?

   - D’Akasha !

   - Ne me parle plus jamais d’elle, elle nous a contaminés tous les deux.

   - Elle t’a ramené à la vie !

   - Je ne suis pas sûr que c’était ce que j’aurais voulu .

   - C’est pour cela que je lui ai demandé de me faire le Don !

   - Tu es dingue !

   - Maintenant, nous sommes de nouveau uni, encore plus qu’avant....

Tom fusionna son esprit avec celui de Bill et partagea la seule chose qu’en tant que jumeau, il n’avait jamais pu partager avec son frère : son âme.

Tous ses souvenirs, toutes ses émotions, ses haines, ses amours, tout ce qu’il y avait dans son cœur et son esprit, depuis ces dix-huit dernières années, pénétrèrent la conscience de Bill, qui accepta, lui aussi, de livrer les tourments de son âme à Tom.

Ne dit-on pas que le fardeau est moins lourd quand on est deux à le porter !

Bien plus tard, un silence de mort régnait dans la cabane. Adossés côte à côte au mur de planches, ils demeuraient perdus dans leurs pensées.

Tom, les mains dans ses poches, sentit de petits cailloux sous ses doigts, il se souvint des rubis, cadeau d’Akasha, les sortant de sa poche, sans un mot, il les tendit à Bill.

A leur contact, ce dernier revécut, à l’instar de Tom, Georg et Gustav, une partie de la vie d’Akasha et de Séthi dans l’Ancienne Egypte, leur amour et sa fin tragique. Il ressentit, de par la mémoire de la Lignée, la souffrance d’Akasha. « Les souffrances » serait plus juste, celle d’avoir dû tuer Séthi, mais aussi celle d’avoir dû partager le Don pour le sauver, sachant ce qu’il pouvait lui en coûter. 

   - Elle m’aime ?

   - Oui, et bien plus que tu ne peux l’imaginer, sans amour pas de Don !

   - Et toi, elle t’aime aussi ?

   - Non, c’est uniquement parce que je t’aime, qu’elle a pu le faire. 

Bill savait que son frère l’aimait, mais ne pensait pas que ce serait au point de sacrifier son humanité. Pour ne pas sombrer dans le mélodrame, Tom détendit l’atmosphère en sortant quelques âneries, donc il avait le secret.

   - Je suis content, moi, de vivre pour toujours, c’est chouette de voler, et puis on va pouvoir faire plein de trucs....

   - Ah bon tu as réussi à voler ?

   - Ouais c’est cool ! Je te montrerai, la première fois c’est mieux de le faire avec quelqu’un qui sait et pour atterrir aussi, en plus il faut faire gaffe aux arbres !

   - Hi,hi, hi ! Éclats de rire commun (et on se fout de moi quand je n’y suis pas)

   - Plus sérieusement : ton attitude avec elle a été horrible, tu as vu dans quel état tu l’as mise ?

   - Je ne me rendais pas compte !

   - Tu lui as brisé le cœur !

   - Je le regrette, j’espère qu’il n’est pas trop tard !

   - Je l’espère aussi ! Elle venait de revivre la douleur de son premier amour perdu et le soir même, elle perd son second amour, tu imagines ……..

   - Tom, es-tu amoureux d’elle ?

   - Non, mais je partage sa souffrance et son amour pour toi, cela fait partie du Don.

   - Tu m’en voudrais de l’aimer ?

   - Ben non, tu peux aimer qui tu veux. Tu l’aimes ?

   - Je crois !

   - On est pas sorti de l’auberge avec toi !

   -  ???

   - Oui ou non ? C’est pourtant simple !

   - Dans ma tête, c’est pas si simple.

  - Tiens donc….. (d'un ton narquois)

  - On devrait y aller !

  - Je te montre comment on vole, dit Tom, tout excité par cette perspective.

 

Chapitre 16

 

 

Akahsa, rentrée à son hôtel, se morfondait ruminant de sombres pensées. Une fois de plus elle se retrouvait rejetée et seule, si seule, trop seule….

Elle passa la journée allongée, sommeillant à moitié, ressassant les derniers événements. Le soir venu, sur un coup de tête, elle empaqueta le strict nécessaire et partit pour un ancien château, dissimulé au centre d’une immense forêt dans une contrée perdue.

Dirgenhar appartenait à la Lignée depuis le moyen âge. Il avait toujours été un refuge, où tout membre de la race était le bienvenu quelle que soit sa lignée, une sorte de no man’s land, même en temps de guerre entre clans.

Le vol fut long, mais rien ne vint le troubler. J’arrivais enfin en vue de la forêt, j’approchais du but. Mais pourquoi faut-il qu’il y ait toujours des arbres, pensai-je. La cour était grande, fort heureusement et dépourvue d’arbres, j’y avais veillé.

Dirgenhar n’avait pas changé au cours des siècles, si ce n’était la poussière et les toiles d’araignées, rien que ne puisse arranger un certain pouvoir, dont j’usai avec parcimonie, celui du déplacement mental. L’utiliser sans réfléchir, c’est le meilleur moyen de se retrouver sur le bûcher pour sorcellerie, les objets qui flottent dans l’air tout seuls ont le don de susciter la méfiance chez les humains.

Je me prélassai dans la bibliothèque, lovée dans un confortable fauteuil, bercée par le crépitement du feu dans la cheminée.

Je revis mon enfance en terre atlante, la mort tragique des mes parents. Je fus recueillie par un membre de la Lignée, il me servit de père, de mère, d’ami, il m’a tout appris, il s’appelait Beladhor.

Quand je fus adulte, il partagea le Don et je devins sa fille; la petite Antinéa devint Akasha !

En ces temps bénis, la Lignée et le peuple atlante faisaient commerce. Ils furent d’ailleurs la seule race à accepter la nôtre et à la respecter. La destruction de l’Atlantide signa la fin de notre collaboration avec la race humaine. Les autres peuples, trop arriérés, avaient si peur des nôtres, qu’ils les tuaient sans même leur laisser une chance de s’expliquer.

Je ne me souviens pas des mes parents, souvent j’avais interrogé Beladhor, qui avait toujours éludé toutes mes questions, dans sa mémoire. Au moment de la fusion, je sus que mes parents avaient été assassinés et qu’il m’avait trouvée cachée dans un coin du Palais.  J’ai supposé que j’appartenais à la lignée royale, il ne m’a jamais ni infirmée, ni détrompée.

Il craignait sûrement que je ne cherche vengeance et que je veuille reprendre le trône…. La Règle d’Or : rester dans l’ombre, il fallait suivre notre ligne de conduite. 

Je pensais à mon bien-aimé Séthi, mon second amour, après mon père. Je n’avais aimé et fais confiance qu’à deux hommes durant toute mon existence, mon père Beladhor, qui m’avait sauvée la vie et Séthi. Son âme si belle m’avait séduite, il était si prévenant, si tendre, je l’aimais tellement……

Voilà qui ne m’a pas servi de leçon : je m’entiche d’un chanteur, qui ressemble à une fille, trouve le moyen de se faire assassiner, me reproche de lui avoir sauvé la vie et d’avoir, en prime, contaminé son frère. Merde, je suis une imbécile! Si je pensais plus avec ma tête qu’avec mon cœur, je ne souffrirais pas autant.

On dit que le temps adoucit les peines... Plus de 5000 ans que j’ai perdu mon amour et j’en souffre encore. Je décidai tout de même de mettre à profit cet adage.

Je me levai, me dirigeai vers le grand hall, grimpai allégrement la cinquantaine de marches qui me séparait du premier étage, franchis la seconde porte à gauche, pour déboucher dans une splendide chambre, ornée de grandes tentures anciennes, où trônait un lit à baldaquin tout de velours cramoisi. Sous le couvre-lit, de doux draps de soie noire ne demandaient qu’à m’accueillir.

Dissimulée par un paravent, une armoire regorgeant de vêtements, me laisse tout loisir de trouver une tenue à ma convenance. Je jette mon dévolu sur un long déshabillé de dentelle et de soie noire, je me remaquille, me coiffe et ainsi parée me glisse dans le lit.

Je me mets alors en stase, ralentissant encore plus mon métabolisme, telle la Belle au Bois Dormant.

Pour 1 an, pour 100 ans, pour 1000 ans, pour toujours ?

 

Chapitre 17

 

 

Georg et Gustav, ayant fort heureusement réussi à entourlouper Saki, avec un art consommé du mensonge qui laissait sous-entendre une pratique assidue, furent on ne peut plus soulagés, lorsque Bill et Tom franchirent la porte du bus.

Ils avaient l’air épuisés, très pâles, mais heureux de s’être retrouvés et d’être rentrés.

   - Alors, que s’est-il passé ?

   - Tu étais où ?

   - Elle est où ?

   - Vous êtes rentrés comment ?

   - Une question à la fois, j’ai retrouvé Bill dans notre cabane à Loitsche, on est rentré en volant !

   - Tu te fous de moi ?

   - Non pas du tout, on peut vraiment voler.

   - J’aimerais bien voir ça !

   - D’abord on doit manger, on a plus de force.

   - On a des barres chocolatées !

   - Ne me parle plus jamais, de barre chocolatée ! J’ai failli en crever, on a besoin sang ! 

   - Prenez le notre !

   - Ça va pas ! On ne va pas vampiriser nos potes.

   - C’est pas dangereux pourtant ?

   - Non, mais cela me ferait trop bizarre de boire le sang de l’un de vous deux.

   - Tu vois quelqu’un d’autre à l’horizon ?

   - Saki !

   - Nooooon !(grand éclat de rire)

   - Encore moins que vous.

Tom et Bill, trop affamés pour tergiverser plus longtemps, acceptèrent la proposition de Georg et Gustav, qui ne trouvèrent pas cela bien agréable, mais n’en souffrirent pas pour autant. Se sentant un peu faiblards, ils se goinfrèrent d’une bonne moitié du contenu du frigo.

   - Vous ne m’avez pas répondu, elle est où ?

   - Qui est où ?

   - Akasha ?

   - C’est une bonne question, n’est-ce pas Bill ?

   - Je ne vois pas le rapport avec Bill !

Tom entreprit de narrer à ses deux amis, tout qui s’était passé depuis son départ avec Akasha : le vol, leurs discussions, les retrouvailles à la cabane, la réaction de Bill et la fuite d’Akasha.

   - T'es con ou quoi ?

   - Elle t’aime, elle fait le Don à Tom, elle vient te chercher et tu la traites pire qu’un chien !

   - Je sais, mais je l’ai compris trop tard.

   - Tu comprends souvent les choses trop tard……

   - Tu n’es pas obligé d’en rajouter une couche.

   - Non, non !

   - Vous savez au moins où elle est ? Après tout vous êtres branchés, si j’ai  bien pigé.

   - Non et c’est bien le problème !

   - On ne la ressent nulle part, elle doit être bien loin.

   - Tu ne crois pas que ….Tom chantonna la mélodie de Spring Nicht

   - Elle est immortelle, elle ne va pas se tuer.

   - Rectification frérot ! Elle est presque immortelle, nuance, si elle le veut vraiment, elle le peut.

   - Elle vit depuis des millénaires, elle ne va pas se tuer pour moi.

   - Qui sait ce que l’amour peut pousser à faire …..

   - Je me demande où elle a bien pu trouver refuge ?

Ce mot éveille un écho chez les jumeaux : refuge, refuge ….

   - Elle est sûrement à Dirgenhar !

   - Dirgenquoi ?

   - Le château de la Lignée, il a toujours été un refuge pour tous ceux de la Lignée.

   - C’est où ?

   - Dans un coin paumé dans les pays de l’est.

   - En Transylvanie, chez Dracula ?

   - Pas bien loin (grands éclats rires des deux frères)

   - Vous vous chargez de Saki !

   - Quoi encore, on ne va plus savoir quoi inventer !

   - Mais non, on vous fait confiance, pour ça votre imagination est sans limites.

   - Ils en ont de drôles !

Les jumeaux partis, Georg et Gustav n’ont de cesse de mettre au point un plan infaillible, pour éviter que Saki ne découvre le pot aux roses.

   - Georg, tu as une idée ?

   - La même que la dernière fois !

   - Non, il ne se fera pas avoir deux fois.

   - Je crois que j’ai la solution ! Il lui chuchote quelques mots à l’oreille.

   - Excellent !

   - Reste à espérer qu’ils soient de retour après demain pour le concert, parce que sans ça, on est dans la merde et jusqu’au cou.

 

Chapitre 18

 

 

Tom et Bill trouvèrent sans peine le château. Passant la porte, ils crièrent :  « Akasha, Akasha »

Pas de réponse.

Très inquiets, ils commencent à courir partout, avant d’entreprendre une fouille méthodique du château. Ils finissent par pousser la porte de la chambre où elle repose,  leurs cœurs se serrent à cette vision.

   - Je l’ai tuée !

   - Non je ne crois pas, je sens un peu ses pensées !

   - Comment on la réveille ?

   - Essaye la version « Belle au Bois Dormant »

   - Hein ?

   - Tu l’embrasses espèce d’andouille !

Bill se penche sur Akasha, pose doucement ses lèvres sur les siennes et…….rien.

   - Tu as une autre idée ?

   - Embrasse-la pour de vrai, pas un bisou, un vrai baiser et passionné si tu peux!

Le baiser se fait passionné et langoureux et …….rien.

   - Je devrais peut-être essayer ?

   - Tu veux mon poing sur la figure !

   - Non, sans façon !

   - Il doit y avoir une autre méthode, ça aurait été trop facile et puis les contes de fées, c’est bon pour les enfants.

   - Reste à la trouver !    

      

   -En bas il y a une immense bibliothèque, l’un des livres a forcément la réponse...

 

Ils redescendent et se rendent dans la bibliothèque, elle regorge de tellement de livres, que cela va être galère pour trouver le bon. Mais quand on aime, on soulève des montagnes (de livres).

Dans un recoin de la bibliothèque, une petite étagère vitrée semble en contenir les recueils les plus précieux et les plus rares. Tom parcourt des yeux les étagères, De Anima ProfundisOlypmus Dei , Sacrificus…et bien d’autres encore, dont il ne déchiffre même pas les caractères : grecs, sumériens, hiéroglyphes, cunéiformes....

   - Merde c’est du chinois, enfin des trucs anciens !

   - Fait comme Akasha !

   - Hein ?

   - Tu te souviens, la première fois que tu l’as rencontrée ? Elle nous a dit avoir appris l’allemand en quelques heures, trouve un dico   et essaye....

   - Je peux savoir pourquoi c’est moi qui m’y colle ?

   - Parce que je n’aime pas lire !

   - Ben, voyons !

   - S’il te plaît ....

   - C’est bon, c’est bon, remonte près d’elle, quand j’aurai trouvé, je te rejoins.

Tom se met en quête d’un dictionnaire de latin, au moins il sait lire les caractères. Le seul exemplaire qu’il trouve est en latin-français, évidemment ne parlant que l’allemand, c’est un problème, qui se trouve vite résolu par un second dictionnaire d'allemand-français.

Il commence par lire celui en allemand-français, une page, puis une seconde, une troisième, de plus en plus vite, en quelques heures les deux dictionnaires sont lus et assimilés. Il retourne consulter les titres des livres et s’empare de De Profundis Anima (Des Profondeurs de l’Ame), lorsqu’un petit éclat doré attire son regard, coincé au fond de l’étagère. Il aperçoit un manuscrit, s’en saisit et admire la richesse de la couverture de cuir, décorée de somptueuses volutes entrelacées, passées à la feuille d’or, de petites pierres précieuses y sont délicatement incrustées.Il ne peut s’empêcher de l’ouvrir, il y découvre une écriture toute en rondeurs et volutes, incompréhensible, mais d’une beauté fascinante. Il en feuillette quelques pages. Tout est du même acabit. Il finit par le déposer sur la table basse et se plonge dans les mystères de l’âme.

Enfin, il pense avoir trouvé la solution. Il grimpe, quatre à quatre les escaliers, pénètre dans la chambre où l’attend un spectacle plutôt inhabituel : son frère agenouillé au bord du lit tient dans ses mains, la main droite d’Akasha et sa tête repose au  bord du lit.

   - Que c’est romantique !(d’un ton légèrement narquois)

   - Hein quoi !(d’un ton endormi)

   - Debout ! Je crois que j’ai trouvé la solution.

Bill se relève tout courbaturé et s’étire en grimaçant.

   - J’ai mal partout !

   - On est censé dormir dans un lit, pas agenouillé à côté.

   - Je me suis assoupi tout seul !

   - Ouais, ouais que tu dis ! On aurait cru le Prince Charmant au pied de sa Belle, Tom rigole gentiment.

   - Heu !  Bill rouge comme une tomate.

   - Alors cette solution ?

   - Anima !

   - Tu peux décoder !

   - Le secret : c’est l’âme. Elle a choisi de se mettre en stase pour une certaine durée et ne se réveillera pas avant. Cela peut durer des millénaires et si tu veux qu’elle revienne avant, il faut ramener son âme de la stase.

   - Comment ?

   - Il faut qu’elle ait une raison de revenir. Si tu l’aimes vraiment, tu dois fusionner avec son esprit et tenter de la ramener.

   -Tu penses que j’y arriverai ?

   -Je ne sais pas.  Mais c’est ça, où elle reste comme cela ………

 

Chapitre 19

 

 

Bill s’étend sur l’immense lit, à côté d’Akasha, se concentre pour tenter de se connecter à elle. Il a beaucoup de peine, elle est déjà si loin de la réalité...

Soudain, il se sent aspiré dans un tourbillon de pensées, au delà du temps, de cette vie, de cette dimension spirituelle. Ce ne sont que couleurs, émotions pures, il est comme hypnotisé : il se sent inexorablement entraîné par ce monde sans fin.

Il n’a plus envie de lutter, c’est si merveilleux, tout est oublié : la souffrance, la tristesse, la vie, la mort ! Le temps lui même semble une illusion. Sans même s’en rendre compte, à l’instar d’Akasha, il entre en stase.

Fort heureusement Tom a gardé le contact avec son frère, il comprend ce qui est en train de se passer juste à temps pour intervenir. Il s’allonge du côté du lit resté libre, il les rejoint et tente le tout pour le tout : mentalement il leur fait ressentir toute sa peine à l’idée de les perdre, toute la haine qu’il leur vouerait s’ils osaient l’abandonner.

La haine est un sentiment aussi fort que l’amour, si ce n’est plus fort encore. Si l’amour peut les ramener, pourquoi la haine ne pourrait-elle pas en fait autant ?

Akasha, la première, ressent les perturbations provoquées par les pensées de Tom. La stase repose sur l’accord parfait du métabolisme et du psychisme. La haine, invoquée par Tom, envahit suffisamment son esprit pour que son métabolisme s’accélère entraînant son réveil. Bill, quant à lui, est ramené involontairement par Akasha.

Elle les dévisage, l’un après l’autre, d’un air peu amène :

 

   - Vous ne m’aviez pas assez fait de mal comme ça ?

   - Je, enfin nous ……

   - Vous ! Rien du tout ! J’étais en paix, enfin plus ou moins.

   - Mais…..

   - Il n’y a pas de mais ! Depuis que je vous ai rencontrés, je vais de Charybde en Scylla, j’en ai marre. J’ai eu la paix plus de 5000 ans, maintenant à cause de vous deux, je vis un enfer.

 

Akasha se met à pleurer toutes les larmes de son corps. Ce sont autant des diamants qui commencent à envahir le lit, sous les yeux ébahis des deux frères.

 

   - Tu pleures toujours des pierres précieuses ?

 

La question est si incongrue, qu’Akasha se met à rire. Ne sachant plus trop où elle en est, cela finit par d’autres larmes : des émeraudes se mêlent alors aux diamants. Quand elle est enfin calmée, elle répond, sur un ton radouci :

 

   - Oui !

   - ?????

   - Les pierres sont les larmes de mon âme, cela fait partie de ma nature.

   - Pourquoi elles ont des couleurs différentes ?

   - C’est ainsi ! rouge pour le sang, vert pour l’espoir, blanc pour la peine, bleu pour le bonheur…..

   - Nous aussi, si on pleure ?

   - Non !

   - Pourquoi, nous sommes comme toi ?

   - Pas tout à fait !

   - ?????

   - Certaines de mes caractéristiques ne me viennent pas de la Lignée, mais de mes origines !

Akasha se tourna vers Bill : tu te souviens lors de notre première conversation mentale, je t’avais dit que je connaissais l’Atlantide ?

 

   - Effectivement !

   - Je suis atlante !

   - C’est une légende !

   - Non et je te l’avais dit.

   - Oui, mais….

   - Je ne mens jamais ! Mon continent a été englouti, mais il a bien existé …..

   - C’étaient des magiciens ?

   - Non, mais leur race était un peu différente de la race humaine.

   - A quel point de vue ?

   - Disons que vous le découvrirez bien assez tôt …. (sourire mystérieux)

 

 

Chapitre 20

 

 

Tom, se sentant de trop, préfère laisse les amoureux en tête-à-tête. Il sait qu’ils s’aiment, reste à ce qu'eux s’en rendent compte et l’acceptent pleinement.

Restés seuls, leurs yeux se noient dans le regard de l’autre, leurs lèvres se frôlent, doucement, tendrement. Leurs gestes se font caresses. Bill fait nonchalamment glisser la bretelle du déshabillé d'Akasha. Percevant ses pensées, Akasha a un brusque mouvement de recul et lui lance un regard à la fois fâché et peiné.

 

   - Décidément tu n’as rien compris et comprendras-tu un jour ?

   - Je ne….

Elle ne le laisse même pas finir sa phrase. Il reste interloqué, tandis qu’en coup de vent, elle sort de la chambre. Dans sa hâte, elle manque de peu de tomber dans les escaliers, s’envole afin d’évier la chute et se cogne au lustre. Il s’en suit de monstrueux jurons, dont je n’oserai répéter les termes.

 

Sur ces entrefaites, Tom, alerté par le claquement de la porte de la chambre, arrive dans le couloir juste à temps pour lui servir de cible. Elle lui tombe littéralement dessus.

 

   - Aïe! Ça fait mal !

   - Parle pour toi, je te signale que je suis dessous et que tu m’écrases !

   - Avant c’était les arbres, maintenant les lustres, je suis maudite …..

   - Pourquoi tu filais à toute allure ?

   - Bill……

   - Qu’est-ce qu’il a encore fait ?

   - Il voulait …(elle le lui chuchote à l’oreille)

   - C’est normal !

   - Comment ça normal ? Je ne peux pas faire ça ! Tu ne vaux pas mieux que lui.

 

Akasha s’apprête à fuir, mais devinant ce qui allait arriver, Tom la saisit fermement par le bras et l’entraîne dans la bibliothèque où il l’assied dans un fauteuil. Il se tient devant elle, les bras sur chacun des accoudoirs : elle est coincée.

 

   - Je veux comprendre pourquoi tu ne peux pas le faire, tout le monde peut le faire !

   - On fait cela pour se reproduire et je ne peux pas me reproduire, elle le regarde tristement.

   - On le fait aussi pour le plaisir !

   - Je ne vois pas l’intérêt.

 

Se rendant compte qu’ils ne sont pas du tout sur la même longueur d’ondes, il plonge dans la mémoire de la race et entrevoit une chose incroyable : leur race ne fait pas l’amour, pas au sens où nous, les humains, l’entendons. Ils le faisaient pour se reproduire, mais quand ils en eurent perdu l’aptitude, ils ne le firent plus.

 

   - Je comprends mieux ta réaction, Bill ne voulait pas le faire pour ce que tu penses, mais par amour.

   - ?????

   - Je t’explique, nous les humains……..

Un moment plus tard Akasha, rouge comme une tomate, a tout compris, il va de soit que Tom est plié de rire.

 

   - Drôle de façon de faire l’amour !

   - Tu le fais comment ?

   - Eleendi !

   - ?????

Nous fusionnons nos corps, nos cœurs et nos âmes !

   - Comme le Don ?

Non, c’est plus grand, plus fort, cela peut parfois se voir et s’entendre à plusieurs kilomètres.

Elle entreprend de lui expliquer les tenants et aboutissant de ladite fusion. Du coup c’est Tom qui vire au cramoisi.

 

   - Tu veux le faire avec moi ?

   - Et mon frère, il va dire quoi ?

   - On peut le faire à trois !

Regard choqué de Tom, sourire ravageur d’Akasha :

 

   - Tu ne trouves pas la méthode humaine choquante, mais la nôtre te dérange ?

   - Ce n’est pas cela, mais à trois ……

   - L’un après l’autre si tu préfères ?

   - Je ne préfère rien du tout !

   - Tu ne sais pas ce que tu perds.

 

Tom la plante là, sans plus de cérémonie, pour aller rejoindre Bill et tenter de lui expliquer l’attitude d’Akasha. En espérant éviter son poing dans la figure, quand il en arriverait à la partie à trois.

 

Chapitre 21

 

 

Bill est toujours dans la chambre, assis sur le rebord du lit, il  n’en mène pas large. Il est malheureux de lui avoir fait de la peine, mais il n’arrive pas à savoir ce qu’il a fait ou dit, pour la mettre dans un pareil état.

 

Tom s’assied à ses côtés et lui passe un bras réconfortant autour des épaules.

 

   - Je sais ce qui s ’est passé !

   - Moi pas !

   - Je l’ai forcée à m’expliquer.

   - ????

   - Tu ne vas jamais me croire…

   - Je suis si nul ?

   - Non, quand même pas !

   - Ça me rassure !

   - Si tu avais regardé dans la mémoire de la race, tu n’aurais pas commis cette erreur.

   - Quelle erreur ?

   - La traiter comme une humaine !

   - Je ne vois pas ?

   - Elle est tellement différente !

 

Tom explique à Bill, ce qu’Akasha lui a révélé sur la reproduction et Eleendi. Sachant qu’il vaut mieux jouer franc jeu, il juge plus sage de lui faire part de la douteuse proposition, qui lui a été soumise. Si cela vient de lui, peut-être que cela passera mieux…..

 

   - Tu n’as pas accepté, quand même ?

   - Non !

   - Elle n’a pas l’air du genre fidèle ?

   - Je pense que tu juges d’un point de vue trop humain !

   - On est censé n'aimer qu'une seule personne à la fois.

   - Eleendi, ce n’est pas faire l’amour, c’est ce qui s’en rapproche le plus pour la race. Cette fusion est un moyen à la fois de   communiquer, de se détendre, de partager des émotions, c’est au-delà de notre conception humaine : une parfaite harmonie. En concert, quand la salle entière vibre au son de notre musique, ce que tu ressens, c’est un peu comparable, en bien moins puissant. 

 

   - J’ai de la peine à imaginer !

   - Moi aussi, mais elle a dit que plus le temps passerait, plus on accepterait nos changements…

   - De là à le faire à trois …..

   - C’est pourtant courant, à deux, à trois, à plus…. Les plus jeunes avec les plus anciens !

   - Pouah !!!

   - Pour ta gouverne, Akasha doit avoir dans les 10 000 ans !

   - Merde ! Je n’avais pas réalisé, elle en paraît à peine vingt  !

   - Heureusement, tu imagines sa tronche si elle paraissait son âge.

   - L’horreur !

   - Tu éviteras d’y penser la prochaine fois que tu l’embrasseras (rires)

   - Tu crois qu’elle écoute nos pensées ?

   - Non !

   - Comment peux-tu en être si sur ?

   - Parce qu’elle serait montée nous coller une baffe !

   - Tom, tu crois qu’elle a déjà fait l’amour ?

   - ????

   - Comme on le fait nous !

   - Je ne pense pas, il faudrait lui demander….

   - On devrait peut-être aller la rejoindre, elle doit se demander pourquoi on ne redescend pas.

   - Essaye de ne pas penser à cette histoire d’âge !

   - Je ne pense à rien !

   - Je t’entends pourtant. 

   - Tu n’es pas obligé d’écouter.

   - Si je t’entends, elle va t’entendre aussi…..

Restée seule, Akasha regarde autour d’elle, son regard se porte sur la table basse où gît le fameux manuscrit à la riche couverture de cuir. C’est la première fois qu’elle le voit, curieuse, elle commence à le lire, sa stupéfaction est à son comble.

 

Chapitre 22

 

 

Ils franchissent la porte de la bibliothèque et découvrent une scène plus que stupéfiante.

Akasha flotte à environ un mètre du sol, le manuscrit à ses pieds émet une lumière dans laquelle baigne son corps. Elle irradie, on dirait un ange !

Muets d’étonnement, Bill et Tom observent le spectacle, tandis que la lumière emplit de plus en plus la pièce, au point où même les deux frères s’en trouvent auréolés. C’est alors qu’ils entendent le chant du livre ! C’est hors de leur compréhension, mais cela enchante leurs cœurs, c’est la plus belle musique qu’ils aient jamais entendue.

Ils sont en accord parfait, à la fois avec la musique et avec Akasha. Tous les trois sont maintenant réunis. Ils flottent, au centre de la pièce, juste au dessus de l’étrange manuscrit. Leurs esprits se mêlent, ainsi que leurs cœurs et leurs âmes, tout leur être vibre au rythme de ce chant si envoûtant.

C’est alors qu’ils voient, par les yeux d’Akasha, son monde, son monde perdu, sa vie. Ils sont une part d’elle, comme elle est une part d’eux. Ce partage si total, si absolu est impossible à décrire, chaque molécule de leur corps respectif est reliée au chant, qui lui-même les relie tous.

Cela semble durer des jours, alors que quelques heures seulement se sont écoulées…..

Le chant s’amenuise doucement et ils reprennent contact avec la réalité, leurs sens décuplés par cette expérience. Durant plusieurs minutes personne n’ose rompre le charme. Akasha finit par murmurer :

 

   - Je suis désolée !

   - De quoi ? C ’était merveilleux !

   - Eleendi !

   - Alors, c’est ça !

   - Oui !

   - Mais tu le faisais seule ?

   - Non, c’est à cause du Manuscrit de Vie !

   - ?????

   - Tom, je sais que c’est toi qui l’as trouvé, je t’en serai éternellement reconnaissante.

   - C’est quoi ?

   - Ce manuscrit contient la mémoire de mon monde. Ce chant est mon langage. Je me suis reliée au chant et je vous ai entraînés malgré moi.

   - Ne le regrette pas, c’était trop beau !

   - Finalement, nous l’aurons eu notre partie à trois ! Akasha se met à rire.

   - Nous avons compris bien des choses ! Tom et Bill se regardent et rigolent de bon cœur.

   - Akasha !

   - Oui !

   - Peux-tu nous lire, enfin nous chanter le livre ?

 

Elle leur sourit, le livre se soulève alors du sol et vient flotter devant elle. Tandis qu’Akasha chante le livre, son corps se remet à luire. Les deux frères écoutent religieusement, extatiquement serait même plus juste.

 

   - Comme c’est beau !

   - Je sais !

   - On peut aussi le parler ?

   - Non ! Le scander tout au plus !

   - Ça parle de quoi ?

   - Des origines de mon continent, de mon enfance, de ma lignée.

   - Et encore ?

   - J’ai enfin la confirmation de ce que je soupçonnais depuis fort longtemps !

   - ????

   - Je vous expliquerai….une autre fois peut-être !

Les heures tournent, le soleil est bas sur l’horizon, il est temps de renter au bercail, Georg et Gus doivent s’inquiéter.

 

 

Chapitre 23

 

 

 

Les vents sont favorables, le voyage du retour est plus rapide que prévu. Nous arrivons un peu avant l’heure du concert, au grand soulagement de Georg et Gus, qui ne savaient plus quoi inventer pour que Saki n'entre pas dans le bus. Il aurait fatalement découvert la disparition de Tom et Bill. D’après les garçons, le chef des gardes en rogne, c’est l’équivalant d’une tornade : dévastateur…….

 

   - Juste à temps !

   - Ca a été ?

   - Limite !

   - ?????

   - Ben, disons que vous sortez d’une monstre gastro et que vous avez passé la journée aux chiottes !

   - Vous ne pouviez pas trouver mieux ? (grimace, mi-figue mi-raisin)

   - On a fait ce qu’on a pu !

En une dizaine de minutes, les garçons narrent une version raccourcie depuis l’arrivée à Dirgenhar jusqu’à mon réveil, puis notre retour. Passant sous silence certaines conversations et Eleendi …..

 

Je souris, sans mot dire. J’aime beaucoup leur façon d’éviter certains sujets délicats. Georg et Gus, remarquant mon air légèrement narquois, me font des signes discrets, d’un clin d’œil, je leur fais comprendre que nous en reparlerons…  

 

   - Il reste deux problèmes !

   - Lesquels ?

   - Nos différences qu’il va falloir cacher et Akasha !

   - Comment Akasha ?

   - Elle reste !

   - Où ?

   - Avec moi ! Enfin avec nous !

   - C’est pas possible ?

   - Où je vais, elle va !

   - Et la tournée ?

   - Elle la fera avec nous ! J’ai failli la perdre une fois, je ne la perdrai pas une seconde fois !

   - Tom ! Tu es d’accord avec Bill ?

   - Oui ! Akasha fait partie de nous, elle reste !

   - Et Saki ? Et les groupies ?

   - Je m’en occuperai, pour tout le monde se sera comme si j’avais toujours été auprès de vous !

   - ?????

   - La manipulation mentale fait partie des mes talents.

   - Sur une foule ?

   - Elle est presque sans limites, je suis atlante ! Personne ne verra vos différences et ne se préoccupera de ma présence.

 

Après le concert, je profitai de l’absence des jumeaux, pour raconter à Georg et Gus la version non expurgée des événements. Ils se montrèrent très intéressés par mon récit et plutôt ouverts à de nouvelles expériences…..

 

Un humain ne peut fusionner avec nous, mais il est toujours bien de savoir ce qu’il y a dans le cœur des gens. Ce que je vis dans les leurs me plaisait beaucoup ……

 

Chapitre 24

 

 

Les jours, les semaines passent sans événement notable, jusqu’à un certain soir, où l’improbable se produit : la batterie, mal arrimée, glisse du podium pour s’écraser trois mètres plus bas. Entraîné dans la chute, Gustav se retrouve sérieusement blessé, l’une de ses baguettes s’est plantée dans sa jambe et a sectionné l’artère fémorale.

 

Le concert est aussitôt interrompu sous les hurlements du public.

 

Immédiatement averti, le médecin arrive de l’infirmerie pour lui prodiguer les premiers soins, il stoppe tant bien que mal l’hémorragie. Gustav s’évanouit, il a déjà perdu beaucoup de sang. Bill, sans réfléchir, propose de lui donner son sang, il est du même groupe sanguin que Gus. Aussitôt dit, aussitôt fait ! Quelques minutes plus tard Gus convulse, le médecin interroge Bill pour s’assurer de sa réelle compatibilité, c’est à ce moment qu’il réalise  qu’il n’est plus humain, donc a fortiori plus compatible.

 

Mentalement, il m’appelle à l’aide. Je précise que même si nos pensées sont liées en permanence, je ne passe pas mon temps à écouter aux portes….. D’ailleurs, les pensées de Bill et Tom sont loin d’être toujours à mon goût….

En quelques secondes, je comprends tout : il n’y a pas de temps à perdre.

 

Gustav a été transporté dans la loge la plus proche, Georg et les jumeaux sont à ses côtés ainsi que le médecin,

une infirmière et Saki. J’entre sans cérémonie :

 

   - Je suis chirurgien, laissez moi seule avec le blessé !

 

Avant que qui que se soit ne réagisse, je manipule leurs cerveaux, afin qu’ils sortent de la pièce en pensant que le blessé est en de bonnes mains et que tout est normal. Sur mon injonction mentale, Bill, Tom et Georg restent auprès de Gus. Par acquis de conscience, je ferme la porte à clef à distance.

 

   - Vous avez fait fort ! Bill surtout !

   - J’ai pas réalisé !

   - Il ne peut pas survivre ainsi, je vais tenter le tout pour le tout !

 

Tout en parlant, je me suis agenouillée près de Gustav, je lui retire le garrot, passe ma main sur sa blessure qui guérit instantanément. Comme nous sommes devenus des amis et des complices au fil des semaines, je compte sur la force de cette amitié pour pouvoir partager le Don.

 

Je métabolise correctement son sang avant de le lui retransmettre. Ayant nettement plus de peine pour la fusion mentale, j’enjoins les jumeaux de m’aider. C’est donc quatre esprits liés, qui partagent la souffrance causée par la transformation et participent à ce voyage initiatique.

 

Quelques heures plus tard, Gus est prêt pour sa première chasse ! Enfin son premier repas !

 

Saki reste médusé, en nous voyant tous sortir de la loge en pleine forme, il regarde Gustav très bizarrement et moi encore plus.

 

Je juge préférable d’entraîner rapidement les garçons dehors, avant que ne pleuvent des questions embarrassantes.

 

Je les laisse partir en chasse sans moi, il est temps qu’ils apprennent à se débrouiller un peu seuls. Tom et Bill sont parfaitement aptes à guider Gus…..Je garde cependant le contact …..

 

J’accompagne Georg au bus en bavardant, je le sens troublé ……

 

Chapitre 25

 

 

Je lui propose de venir se balader avec moi, avant de retourner au bus. Nous marchons sans but précis, je lui laisse tout loisir de me parler. Ne voyant rien venir, comme je n’aime pas laisser mes amis ruminer de sombres pensées, je prends sur moi de rompre un silence devenu pesant :

 

   - Je sens que tu vas mal !

   - Maintenant il n’y a plus que moi !

   - Que toi ?

   - Je suis le seul encore humain !

   - Je comprends et j’en suis désolée !

   - Je ne t’en veux pas, mais je voudrais …..

   - Tu voudrais … ?

   - Etre comme vous, murmura-t-il dans un souffle.

   - Pour les autres, je n’ai pas eu le choix ! Mais toi, es-tu sûr de vraiment le vouloir ?

   - Tu sais cela fait un moment que j’y pense, mais je n’osais pas en parler !

   - Ah bon ! Je te fais si peur ?

   - Non ce n’est pas ça, mais je ne voulais pas que Gus se sente seul.

   - Donc tu n’as rien dit pour lui ? Enfin à cause de lui ?

   - Oui !

   - Quelle belle preuve d’amitié !

   - Maintenant qu’il est comme vous …..

   - Qu’il en soit donc ainsi !

Je lui souris, tout en écartant les bras, il vint s’y réfugier en toute confiance. Ce soir, deux fois le Don fut partagé. Son amitié, si profonde pour ses amis et moi–même, fut suffisante pour me permettre la fusion. Nous sentîmes la joie des autres à cette nouvelle.

 

Dès que Georg fut suffisamment remis, nous partîmes rejoindre Tom, Bill et Gus, pour une seconde chasse, mais à cinq cette fois.

 

Vous n’imaginez pas le plaisir que c’est, pour moi, de me retrouver entourée de mes semblables après avoir été si longtemps seule. Ils sont ma famille ! Ils sont des enfants de la Lignée, tout comme moi, quoiqu'ils aient été humains, alors que je fus atlante …..

 

Ils n’ont pas encore saisi toute la portée de cette différence, ce n’est qu’au fil de temps qu’ils comprendront tout ce que cela implique…… 

Puissant et glorieux fût mon monde, c’est en moi que se perpétuera notre race !

 

Chapitre 26

 

 

Bill, une fois de plus venait de me tanner pour que je lui apprenne le chant du livre. J’éludais depuis un certain temps ses questions et ses demandes, mais il se faisait de plus en plus insistant :

 

   - Apprends-moi ta langue !

   - Ce n’est pas possible !

   - Tout s’apprend !

   - Non, le chant ne s’apprend pas, ceux de mon peuple naissent avec le chant en eux !

   - Je sais chanter, je dois pouvoir apprendre.

   - D’autres que toi ont essayé, c’est impossible.

   - Ils ne savaient pas chanter !

   - Oh que si ! Et merveilleusement bien …..

Quand Bill a une idée en tête, il ne l’a pas ailleurs. Si vous ne le saviez pas eh ! bien ! maintenant vous le savez !  Pour avoir la paix, je lui tendis le manuscrit afin qu’il puisse le lire. Au vu de son aptitude pour les langues et de son amour pour la lecture, je pensais être vite débarrassée…..

 

A mon grand étonnement, il fut le premier à réussir, un tant soit peu, à chanter notre langue sans être l’un des nôtres.

 

Ma stupéfaction passée, je me mis à chanter avec lui, sous l’œil médusé des trois autres qui n’en croyaient pas leurs oreilles : de simplement écoutable, le chant finit en apothéose et en lumière …. (le chant fait partie de nous : quand nous chantons nos molécules s’accordent au chant et nous luisons, il ne peut en être autrement)

 

   - Vous devriez faire un duo, vous allez si bien ensemble !

   - Tokio Hotel et Akasha chantent l’Atlantide ! (j’en pleure des larmes de saphirs ……)

   - Et pourquoi pas ?

   - Comment tu vas expliquer au gens que je deviens lumineuse ?

   - La magie des trucages ….

   - Pour le public, je veux bien ! Mais le staff va comprendre et cela ne doit pas être.

   - On trouvera …….

   - J’ai vécu toute ma vie cachée, c’est la Règle d’Or, je n’y dérogerai pas.

   - Tu pourrais …..

   - Non ! Et toi non plus ! Hors de question que tu chantes dans ma langue en public.

   - Alors là, c’est fort ! Je fais ce que je veux !

   - Quand tu la chanteras aussi bien que moi, tu vas aussi irradier.

   - Je ne suis pas atlante, je ne brille pas !

   - C’est ce qu’on verra !  Tâche de chanter plus juste !

Bill durant notre duo avait enfin compris exactement ce qu’il chantait, il me regardait d’un tout autre œil. Je lui enjoignis mentalement de ne jamais rien révéler de ce qu’il avait pu découvrir sur mes origines….

 

La persévérance finit toujours par payer et Bill irradie quand il chante ……. Je le savais !

 

Chapitre 27

 

 

Gus et Georg n’avait pas oublié une certaine conversation, sur la fameuse partie à trois. Cela devait les turlupiner depuis un certain temps, mais j’éprouvais un malin plaisir à jouer les innocentes. Après tout, n’est-ce pas aux garçons de faire le premier pas ?

 

   - Akasha ?

   - Mmmh ! (sourire malicieux)

   - Tu sais, on aimerait bien ?

   - Quoi donc ? (ton innocent)

   - Le truc ?

   - ?????  (je suis carrément sadique)

   - Ce que tu as fait ……

Malgré moi, je me mets à rire, ils comprennent que je les mène en bateau et que j’ai parfaitement compris. J’ai droit à des regards assassins. Voyant que je n’en ai cure, ils se marrent aussi.

   - Je suis désolée, mais vous étiez trop mignons !

   - Hum ! (ils rougissent)

   - Ce soir, c’est repos et nous dormons dans un ancien manoir, je vais organiser cela, rejoignez moi à minuit !

   - L’heure des sorcières !

   - Joli sens de l’humour !

Avec une pointe de sadisme, je les fis me voir comme une horrible sorcière. Je crois que je n’oublierai jamais leurs têtes : hilarant …..

 

J’ai parfois un drôle de sens de l’humour, mais à mon âge c’est excusable, vous ne pensez pas ?

 

A minuit, nous nous rendons tous les cinq, en catimini, à la cave. Nous traversons une ancienne pièce, où sont entreposés les grands crus du maître des lieux, pour arriver dans une immense salle voûtée, où traînent quelques vieux tonneaux empilés dans un coin.

 

Nous nous mettons en cercle au centre de la pièce, Bill et moi commençons à chanter, cela facilite la mise en condition pour la fusion. La magie du chant produit rapidement l’effet escompté, créer cet état qui transcende l’amour : Eleendi !

 

Les secondes, les minutes, les heures passent,  nous sommes hors du temps, hors de ce  monde …..

 

Tout à notre bonheur, nous en oublions un peu trop la réalité. Le matin venu, Saki, inquiet de trouver nos chambres inoccupées, entreprend une fouille méthodique du manoir. Arrivé à la cave il entend le chant, sa curiosité et son inquiétude à notre encontre, l’incitent à pousser la porte et à en franchir le seuil pour jeter un œil.

 

Il reste bouche bée devant la scène qui s’offre à ses yeux: nous flottons tous au dessus du sol, auréolés de lumière !

 

Je sens sa présence et mets fin à notre fusion, doucement nous touchons terre et la luminescence s’estompe.

 

Saki me désigne du doigt : « Vampire ! Sorcière ! »

 

Gus, Tom, Bill et Georg essayent tant bien que mal de le détromper, mais il campe sur ses positions, il m’accuse de tous les maux : il a remarqué que les changements chez les garçons coïncidaient avec ma venue. Sans compter mes crocs, mes oreilles pointues, la guérison miraculeuse de Gustav, j’en passe et des meilleures…..

 

Tandis que je le fixe droit dans les yeux, ma sentence tombe sans appel :

 

   - Il doit mourir !

 

Chapitre 28

 

 

Je le mets aussitôt hors d’état de nuire :

 

   - Il est mort ?

   - Non pas encore, il est en catalepsie !

    - Tu ne vas pas le tuer ?

   - Le mythe des vampires est profondément ancré chez les humains. De là, à ce qu’il essaye de me tuer dans l’espoir que vous redeveniez humains, il n’y a qu’un pas !

   - Il n’en fera rien !

   - J’en suis moins sûre ! C’est lui ou moi !

   - Mais on l’aime bien !

   - Moi pas !

   - En plus se serait suspect !

   - Quoi donc ?

   - Sa mort !

   - Je sais faire disparaître les cadavres sans laisser de traces.

 

Après plus d’une heure de jérémiades des garçons, je finis par céder. J’efface toute trace dans la mémoire de Saki et le déplace juste en dessous des vieux tonneaux, que je renverse d’une poussée mentale. Tandis que nous sortons, je le réveille de sa transe, laissant croire à un accident….. 

J’espère au moins qu’il aura bien mal, je suis particulièrement vexée par les propos qu’il a tenus à mon encontre …. 

De retour dans nos chambres, nous défaisons nos lits afin de laisser croire que nous y avions dormi du sommeil du juste.

 

Nous descendons ensuite tranquillement pour le petit déjeuner. Nous allons, comme d’habitude, faire semblant de manger. Un peu de manipulation mentale, de grandes poches pour dissimuler croissants, pains et autres joyeusetés et le tour est joué.

 

Saki nous rejoint, un sac de glace posé sur la tête pour tenter de soulager son mal de crâne. Même en voyant l’énorme bosse qui orne son front, je n’ai absolument aucun remords quant à mon acte. Je suis un peu rancunière, je le sais, mais on ne se refait pas .....

 

Les garçons, le nez dans leurs assiettes, essayent tant bien que mal de garder leur sérieux, en m’entendant ricaner mentalement.  

   * Tu n’es vraiment pas gentille ! *      

   * Il n’est pas question de gentillesse quand la survie est en jeu. *     

   * Tu ne crois pas que tu exagères ? *     

   * Si vous étiez les derniers de votre race, vous feriez tout pour survivre, sans pitié aucune. *     

   * Mais Saki ….. *     

   * C’est une menace, il faudra toujours que l’un de nous le surveille et le garde sous contrôle mental. *     

   * Si tu le dis …… * 

N’étant pas censée savoir le pourquoi du comment de son état, je l’interroge l’air de rien : 

   - Auriez-vous eu un accident ?

   - Oui, mais j’ai de la peine à me souvenir des circonstances exactes !

   - Votre mémoire vous joue des tours ?

   - Ça doit être le choc !

   - Vous devriez peut-être consulter un médecin !

   - Bonne idée !

 

Nous voila tranquilles pour la journée, personne sur notre dos, on va pouvoir en profiter. Je ne peux me retenir de suggérer que l’on devrait assommer Saki plus souvent …..

 

Chapitre 29

 

 

Au fil des jours, nous nous lions de plus en plus, nous sommes comme les cinq doigts de la main : inséparables !

 

Il est plus que rare, de voir l’un de nous sans les quatre autres. Tout le monde a fini par m’accepter, certains plus facilement que d’autres. Heureusement pour moi ! Car contrôler mentalement, en permanence, un grand nombre de personne, n’est pas des plus plaisant.

 

Répétitions, concerts, voyages, interviews, je suis toujours présente, tout en passant inaperçue. C’est mon choix, mais je ne le regrette pas.

 

Je n’ai jamais le temps de m’ennuyer, les garçons s’arrangent toujours pour m’impliquer le plus possible dans leur groupe. Ils savent que j’apprécie beaucoup leur comportement à mon égard, même si je ne le leur dis pas. Ils connaissent mes pensées profondes, je connais les leurs. Plus le temps passe, moins les mots deviennent utiles…

 

N’ayant, jamais en plus de 10 000 ans, dérogé à la Règle d’Or, il m’est difficile d’accepter leur notoriété. Je fais cependant de mon mieux pour protéger notre secret, en réparant au fur et à mesure, les bévues qu’ils ne manquent pas de commettre : répondre aux gens avant même d’avoir entendu les questions, faire voler des objets sous le nez du staff, voler sans s’assurer de ne pas être observés et j’en passe….

 

J’ai beau me tuer à leur expliquer de brancher « leur radar interne ». Rien n’y fait ! Mais je les aime, alors j’arrange les choses en leur faisant gentiment la leçon…..

 

Je sais que je ne peux pas attendre d’eux la même sagesse que la mienne. Il faut du temps pour que la mémoire de la race, les imprègne au point d’en faire mes semblables. Leur nature, profondément humaine, a souvent tendance à prendre le dessus.

 

Ils n’auront plus à craindre les blessures et ne vieilliront plus. Ils connaîtront les pensées de leur entourage, afin de pouvoir se préserver.

 

Je m’inquiète cependant du jour où ils tomberont amoureux, je sens que cela va être galère à gérer ! Pourvu que cela arrive le plus tard possible …..      

   * Misère, de misère ! Je sens les ennuis ! *

 

Je quitte la loge précipitamment pour les coulisses, d’où j’ai une vue parfaite sur la scène. Et sur Bill qui chante, auréolé de lumière tel un ange….Je m’apprête à piquer une monumentale crise de rage, je ne tolère pas la désobéissance.  Je lui avais bien interdit de chanter dans ma langue en public, lorsque je me rends compte que c’est en allemand qu’il chante !      

   * Merde, comment il a fait son compte ? *     

   * Je ne sais pas c’est arrivé tout seul ! * m’informe mentalement Tom.

 

Je vois le public réagir plutôt bizarrement : il ne prend pas cela pour un trucage. Je perçois plutôt une sensation de malaise ….

 

Aux grands maux, les grands remèdes : je calque ma voix sur la sienne, pour un duo, où se mêlent nos deux langues. Il me prend par la main et m’attire à ses côtés sur le devant de la scène. Je ressens à mon tour cette sensation de partage avec le public, je comprends que cela le rende si heureux : Eleendi version humaine…..

 

Je pousse les propriétés hypnotiques de ma langue sur les humains à son maximum, j’y rajoute une formidable poussée mentale. Par bonheur, c’est leur dernière chanson de la soirée. Le concert finit sous les hurlements de joies des groupies, l’incident est oublié ! Certains, peut-être, se souviendront de deux anges de lumière dans une sorte de rêve éthéré …… 

Épuisée par l’effort mental, je m’effondre…..

 

Chapitre 30

 

 

Bill me soulève et me porte dans la loge en demandant aux autres de se débrouiller pour ramener du sang en quantité suffisante. Je ne me suis pas nourrie depuis plusieurs jours et j’ai présumé de mes forces. J’évite de chasser des humains avant d’avoir vraiment faim : discrétion oblige !

 

Je reprends connaissance, allongée sur le divan de la loge.

 

   - Tu te sens mieux

   - Un peu !

   - Je ne comprends pas ce qui s’est passé !

   - Tu aimes tellement chanter, que ton corps s’est mis en phase avec le chant ! Moi, je ne peux pas le contrôler, c’est intrinsèque à mon espèce, mais pas à la tienne, tu peux le contrôler.

   - Tu en es sûre ?

   - Certaine !     

Je tente de lui expliquer comment se déphaser du chant, c’est plus facile à faire qu’à dire. Sachant que j’en suis incapable à moins que….

Il me vient une idée. Si je chante ma langue, je suis forcément en phase, mais si j’en chante une  autre, je devrais pouvoir me déphaser..

Je lui enjoins de chanter 1000 Meere avec moi. Mis à part le fait que je n’avais jamais chanté dans une autre langue, cela s’avéra plus facile que prévu de chanter juste. Nous nous mettons à luire, je lie nos esprits et me déphase, en l’entraînant avec moi. Ouf ! Ça marche, je sens qu’il me suit et nous réussissons de concert ce délicat processus !

 

   - Merci, merci !

   - Il n’y a pas de quoi !

   - Oh si ! Tu ne te rends pas compte, si j’avais dû cesser de chanter ….

   - Je pense savoir ce que tu éprouves lorsque tu chantes.

   - Ah bon !

   - J’ai ressenti le public tout à l’heure !

   - C’est merveilleux ! Tu ne trouves pas ?

   - C’est indescriptible, tel Eleendi….

   - Je n’aurais pas pu mieux dire !

   - J’aime t’écouter chanter !

   - Moi aussi !

Sur ces entrefaites, Gus, Georg et Tom nous rejoignent avec trois charmantes groupies.

 

 * J’espère que tu en auras assez ? *

 * Je préfère les hommes, je peux prendre plus de sang ! *

 * On se voyait mal draguer des mecs ! Alors on en a pris trois ! *

 * C’est gentil ! *

 

Pas mauvais, le sang de groupies, je me demande si plutôt que d’aller chasser, je ne vais pas envoyer les garçons draguer …….

 

Chapitre 31

 

 

 

Trois jours de congé, avant la reprise de la tournée : ils sont les bienvenus !

 

Je propose que nous partions tous à Dirgenhar, pour nous reposer à l’abri du monde et des ennuis. Ma proposition est accueillie avec enthousiasme, c’est tellement à l’écart, que tout est permis ou presque….

 

Entre les quatre tours de gardes, la crypte, les caves, les souterrains, cela promet de belles parties de jeux de rôles, j’adore cela et grandeur nature, c’est le summum. J’espère qu’ils aiment aussi, demain je leur en parle ! On y trouve aussi deux salons, une salle de bal, un bureau, une bibliothèque, une cuisine, fort peu utile, je le reconnais. Ainsi qu’une bonne vingtaine de chambres, si mes souvenirs sont bons, je ne les ai jamais comptées…

 

C’est le plus bel endroit au monde pour moi, je m’y sens à l’abri, c’est mon chez moi, le seul qui me reste ….

 

Je pense toujours avec nostalgie à l’Atlantide, « le Paradis sur terre », si beau, trop beau, au point d’attirer les convoitises. Les humains ont préféré le détruire, puisse qu’ils ne pouvaient le posséder !

Longtemps, j’ai haï la race humaine. J’ai fini par comprendre que l’on ne pouvait en vouloir à une race entière, du comportement d’un petit nombre d’entre eux !

 

Pour Georg et Gus, c’est une première, je suggère à Tom de leur faire visiter les lieux. Vu la taille de mon château et leur curiosité sans borne, ils en auront pour des heures.

 

Quelques heures que nous pourrons mettre à profit, Bill et moi, pour passer enfin une soirée en amoureux, sans crainte d’être dérangés. Du moins, je l’espère, il est si rare que nous arrivions à avoir un moment pour nous. 

 

Je l’entraîne dans ma chambre, celle au grand lit à baldaquin, dans laquelle il m’avait trouvée en stase, il a quelques mois. Je prends soin de fermer la porte à clef : ne tentons pas le diable !

 

Je me niche dans ses bras qui avaient si bien su m’enlacer. Entre deux baisers, il me murmure au creux de l’oreille :

 

   - Mon ange ?

   - Oui !

   - J’aimerais te poser une question ?

   - La réponse est non !

   - Tu ne veux pas me répondre ?

   - Je connais ta question ! Non je n’ai jamais fait l’amour à votre façon !

Je l’aimais, j’avais confiance en lui, doucement je pris sa main dans la mienne et la posais sur mon cœur, lui montrant que j’étais prête à m’offrir à lui.

 

De baisers en caresses, la tendresse se fit passion, tout en nous fusionnait : nos corps, nos cœurs et nos âmes.

Plus brillante que les étoiles,  la lumière de notre amour illumina tout alentours ……

 

   - Mon amour pour toujours je serai tienne !

   - Je t’aimerai éternellement ma Reine …….

 

 

FIN

 

 

Le Chant d’Akasha

 

 

Par delà le temps

Depuis plus de 10 000 ans

Elle survit parmi nous

La dernière de l’ancienne Lignée

La solitude, la souffrance

La peine et la mort

Furent ses compagnes

Des années durant

 

REFRAIN

Par le pouvoir du chant

Du cœur et de l’âme

L'amour renaîtra

Eleendi

 

 

Nos yeux se sont croisés

L’amour s’est réveillé

Je t’ai tout donné

Pour ne pas rester seule

 

Tu pleures ton humanité perdue

Pour toi, j’ai vaincu la mort

Dans ce monde je t’ai ramené

Tu as gagné l’éternité

 

REFRAIN

 

Par le pouvoir du chant

Du cœur et de l’âme

L'amour renaîtra

Eleendi

 

Tu m’as brisé le cœur

En reniant ce Don

J’ai voulu pour toujours m’en aller

Tu m’en as empêchée

 

La souffrance a failli nous perdre

Mais l'amour a triomphé

Pour toujours

Je serai tienne

 

REFRAIN

 

Par le pouvoir du chant

Du cœur et de l’âme

L'amour renaîtra

Eleendi

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Je recherche fan ou passionnée pour traduire la fiction en allemand et en anglais.

Pour me contacter

 

Remerciements

A mon ami Paul, pour avoir eu la gentillesse de corriger mes écrits !

A mon mari Mike, pour avoir supporté mon indisponibilité et mes sautes d'humeur !

Au groupe Tokio Hotel, pour leur musique et leurs chansons, qui m'ont redonné l'envie d'écrire !

 

 

    J 'aurai plaisir à lire vos commentaires!

 

 

 “ Les Chroniques d'Akasha ”